Édito

Italie: un but pour l’honneur

Brouillon auto 69
Matteo Salvini, vice-président du Conseil italien et chef de file de la Ligue, s’est dit fier de défendre les frontières de son pays, lors d’une allocution auprès de son parti samedi dernier. KEYSTONE
Crise migratoire

Le parquet d’Agrigente, en Sicile, a ouvert une enquête contre Matteo Salvini pour «séquestration de personnes, arrestations illégales et abus de pouvoir». La procédure vise le ministre de l’Intérieur et son chef de cabinet dans l’affaire du Diciotti, le navire des garde-côtes italiens bloqué durant plusieurs jours dans le port de Catane.

Un revers pour Salvini, dont l’intransigeance sur la question migratoire constitue le fond de commerce. Ironie cinglante, ce n’est pas de Bruxelles mais de «l’intérieur» que le caillou a été lancé dans sa botte. Et la nouvelle est tombée au moment où la crise du Diciotti se dénouait: les 150 réfugiés qui se trouvaient à son bord ont pu descendre à terre dans la nuit de samedi à dimanche.

L’intervention de la justice sicilienne, aussi réjouissante soit-elle, pose le problème de la judiciarisation des enjeux politiques. Car aucun parquet ne remplacera le rapport de forces capable d’inverser la tendance dans l’Italie gouvernée par le Mouvement 5 Etoiles et la Ligue. Or si rapport de forces il y a, il se joue non seulement vis-à-vis de l’Union européenne, mais aussi au sein de la coalition au pouvoir: minoritaire, la Ligue a tout à gagner des gesticulations et vociférations de son chef, Matteo Salvini. D’autant que son discours anti-élites trouve un écho favorable au sein d’une population paupérisée par les politiques néolibérales et témoin de la faillite de l’Europe sur le dossier migratoire.

L’investigation ouverte à Agrigente a peu de chances d’aboutir, car il lui faut l’aval du Sénat, dominé par la coalition au pouvoir. Aucune alternative ne se dessine pour l’heure à gauche, le Parti démocrate étant tiraillé entre son aile centriste incarnée par l’ex-premier ministre Matteo Renzi (battu aux dernières élections) et son aile progressiste, minoritaire. Il faudra donc se contenter des initiatives locales, à l’image des maires de Palerme, Leoluca Orlando, et de Riace, Domenico Lucano, qui défendent courageusement l’accueil des migrants.

Opinions Édito Roderic Mounir Crise migratoire

Connexion