Démission de Pierre Maudet? Le priver de la police et de la justice? Ce week-end, des présidents de partis de gauche ont lancé la fronde contre le conseiller d’Etat genevois, empêtré dans son voyage prétendument privé à Abu Dhabi en 2015. Il faut dire que la RTS révélait que juste après ce voyage offert par un personnage lié au régime, l’entreprise émiratie Dnata obtenait une concession importante à l’Aéroport, dont Pierre Maudet est ministre de tutelle.

En l’état, le lien de cause à effet n’est qu’un soupçon. Ou du vent si l’on croit l’aéroport, qui affirme que la procédure d’attribution a été sans tache. Espérons-le pour le bien de la République. Mais en acceptant un très coûteux voyage de la part d’un «ami d’un ami», Pierre Maudet, loin de la simple imprudence qu’il a concédée, a bien commis une véritable faute éthique, assaisonnée de demi-vérités, qui a déclenché une crise politique et ouvert la porte à la suspicion.

Mais ce n’est pas ce ministre affaibli que le Conseil d’Etat élu a désigné mardi à la présidence du collège. Ses collègues ont offert ce poste hautement honorifique au brillant politicien, élu dès le premier tour le 15 avril. Alors que l’exécutif entend placer la législature qui s’ouvre sous le signe du consensus et de la cohésion, il n’a pas souhaité s’aliéner M. Maudet et son parti.

Le calcul est risqué. Car si les difficultés du conseiller d’Etat devaient se concrétiser en poursuites judiciaires ou même en une condamnation, alors cette casserole embarrasserait tout le gouvernement qui a choisi de lui confier les lumières de la présidence. En réalité, par cette désignation, le collège endosse d’ores et déjà la faute du ministre, en donnant le message que les faits ne seraient pas assez graves pour mériter de le sanctionner politiquement. En soutenant contre vents et marées l’un des siens, l’exécutif apaise-t-il vraiment la vie politique genevoise, ce qui est son but affiché?