Édito

Le reflet d’une crise politique globale

Editorial

Depuis dimanche, l’Allemagne doute d’elle-même. Angela Merkel ne parvient pas à composer un gouvernement sur un programme ad minima. Les socio-démocrates du SPD refusent pour l’heure la reconduction de la grande coalition dans laquelle ils se sont fait allègrement plumer. Les libéraux du FDP ont retrouvé leurs atavismes droitiers. Le spectre d’une dissolution et de nouvelles élections – une hypothèse constitutionnellement complexe – point.

La tentation de tout mettre sur le dos d’Angela Merkel est forte. Elle serait usée par douze ans de règne à la Chancellerie, elle se serait lancée dans la législature de trop à l’instar de Helmut Kohl ou de Konrad Adenauer. Ce n’est sans doute pas entièrement faux. Mais cette personnalisation occulte des tendances de fond autrement plus fondamentales.

C’est bien à une érosion des partis traditionnels que l’on assiste. La CDU-CSU a perdu des plumes lors des élections législatives de septembre (avec une perte de 65 sièges). Tout comme le SPD (-40 sièges) qui ne pèse plus que 21% de l’électorat. Et l’émergence de nouveaux partis rend le système instable, la dernière entrée en date étant celle de l’extrême droite de l’AFD qui occupe 94 sièges au Bundestag.

Ce phénomène n’est pas propre à l’Allemagne. Il se retrouve en France avec l’OPA d’En marche sur fond d’implosion du PS et des Républicains. Ou encore aux Etats-Unis avec le putsch électoral de Trump. C’est bien à une crise politique et des valeurs que l’on assiste dans les démocraties occidentales. Les repères sautent.

La gauche, si elle veut retrouver une crédibilité et de nouveau représenter une alternative à la guerre sociale décrétée au nom du profit doit se réinventer. En reconstruisant une opposition au capitalisme rugissant sur des bases de solidarité, de justice sociale et de défense radicale de l’environnement.

Cela ne se fait pas en un jour. Mais suppose une capacité à sortir le nez du guidon, à tenter des politiques de rupture. C’est bien en défendant des intérêts concrets des travailleuses et des travailleurs contre les 1% que la confiance sera rétablie, pas en cherchant à tout prix à se faire le porte-voix d’un capitalisme prédateur aux lois d’airain, au nom d’un pseudo-réalisme. Finalement, la question n’est pas si compliquée que cela, osons simplement les réponses qui peuvent fâcher.

Opinions Suisse Édito Philippe Bach Editorial

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