Le poids des minorités
Faut-il faciliter le lancement d’initiatives et de référendums à Genève? Le 24 septembre prochain, les citoyens seront appelés à trancher cette question par les urnes. Ils devront décider, en somme, d’augmenter ou non leur propre pouvoir dans le système politique du canton. On peut espérer que l’accueil populaire à cette réforme constitutionnelle sera plutôt favorable.
Au bout du Léman, les affrontements politiques se durcissent au fil des ans. Les attaques de la droite contre les prestations publiques s’intensifient face à une gauche minoritaire. Au parlement, la recherche du compromis n’est plus qu’une illusion. Les projets à caractère sociaux, notamment, sont généralement balayés sans réel débat. Dans ce contexte, simplifier le recours au peuple quand toutes les autres voix sont bouchées paraît salutaire. Pour les associations et les partis adeptes des outils de la démocratie directe, la réforme soumise au vote représente par ailleurs des économies bienvenues en termes de ressources militantes.
Dans le système suisse, la menace sérieuse du lancement d’un référendum tend à augmenter le poids des formations minoritaires. On l’a observé récemment avec la troisième Réforme de l’imposition des entreprises (RIE III). Aux chambres fédérales, la droite – majoritaire et présomptueuse – avait tenté le passage en force en élaborant un projet penchant largement du côté du grand patronat, sans égards pour l’opposition. En février, le peuple l’a sèchement rappelée à l’ordre et la gauche dispose aujourd’hui de solides arguments pour rééquilibrer la réforme.
La démocratie directe n’a, certes, pas que des avantages. Nul doute que certaines formations genevoises pourraient être tentées d’imiter l’UDC suisse pour lancer des initiatives comparables à celle ayant instauré l’interdiction des minarets. C’est le revers de la médaille qu’il convient d’accepter, en soulignant que le parti blochérien est aujourd’hui en perte de vitesse sur le terrain des votations.
Dans de nombreux cas, une initiative populaire permet des avancées impossibles autrement. On a pu le constater la semaine dernière: les députés genevois se sont penchés sérieusement sur la problématique du remboursement des soins dentaires, grâce à une initiative du Parti du Travail. Si elle ne redoutait pas une adoption du texte par le peuple, la droite ne se serait-elle pas contentée de refuser le texte de façon expéditive?