Le long des crêtes
Ils regardent les rondes formes de la roche calcaire sous leur pas, poursuivent leur chemin le long des crêtes. Là en bas, loin à la ronde, le territoire est comme une vaste carte géographique qu’ils auraient dépliée devant eux : piqué de villages, quadrillé par les champs jaunes, verts, bruns, bordé par le bleu du lac, le panorama est écrasé par l’immensité du ciel. Ils hument l’air frais qui rosit leurs joues, leurs sacs se balancent dans leur dos, de temps à autres, ils s’arrêtent, se regardent, se sourient.
Ils ne connaissent pas les frontières, ils vagabondent dans les hauteurs et ne sont jamais que de passage. Les âmes des villages, au pied de la crête, grimpent jusqu’à eux en se faufilant entre les sapins. Là-haut, elles les accompagnent jusqu’à ce que d’autres âmes, à mesure qu’ils progressent, les rejoignent et prennent le relais.
Le soir, lorsque la boule rouge du soleil s’enfonce à l’extrémité du territoire, ils toquent à la porte d’un alpage, demandent un peu d’eau et s’enquièrent du lieu propice où planter leur tente. On les informe de l’axe des vents, de la marche des troupeaux, de la souplesse des sols, et ils s’installent non loin, à l’abri d'un muret de pierres. BP