Édito

Mauvaise posture

Offices postaux

Depuis plusieurs semaines, les cantons égrènent leur litanie d’offices postaux menacés. Il y en a 500 à 600 dans tout le pays, près de 150 pour la seule Suisse romande. Les pétitions circulent à travers le pays, les syndicats se mobilisent, les élus déposent des questions, des interpellations… Et la Poste poursuit sa restructuration au rouleau compresseur.

Qui osera encore feindre la surprise? Lorsqu’elle est passée du statut d’établissement public à celui de société anonyme, en juin 2013, l’entreprise annonçait la couleur: ce statut juridique lui donnerait «les moyens de rester une entreprise saine et compétitive et de proposer des postes de travail progressistes». Pour ce qui concerne la compétitivité, nul doute, elle y met du sien et les résultats financiers sont à la hauteur, avec 558 millions de bénéfice consolidé en 2016, permettant de verser près d’un million de salaire annuel à sa directrice. La base de la pyramide, quant à elle, subit les exigences de rendement.

Concernant les postes de travail progressistes, on se demande si c’est là la définition pour les épiciers chargés de compenser les fermetures d’offices en gérant nos lettres, colis et versements entre deux ventes – personnel non soumis à la convention collective. Ou alors, peut-être, est-ce une référence au job de «robots de livraison autonomes» testés depuis quelques mois?

Partout, les dérives de ce service soi-disant universel se font sentir. Les postiers ont toujours moins de temps pour des rondes toujours plus longues. La distribution s’étale jusque sur le coup de midi, les solutions comme les cases postales disparaissent ou coûtent les yeux de la tête… On en vient à regretter le vote de l’année dernière sur le service public, qui voulait interdire à la Poste, Swisscom et aux CFF de viser un but lucratif. Un élu socialiste affirmait alors: «Sans les moyens financiers nécessaires, le service et les prestations diminueront. Si elles ne peuvent plus générer de bénéfices, les entreprises ne pourront plus investir dans les services de base. L’étendue et la qualité du service public sont menacées!»

A l’heure actuelle, les régions périphériques, rurales et même urbaines se voient pourtant spoliées de leur accès à une offre de base digne de ce nom. Aveuglée, la Poste déclarait récemment que «les gens ne voient que les offices de poste qui ferment, [et] oublient tous les points d’accès que nous avons ouverts». Grossière erreur. «Les gens» n’oublient pas. Mais il faudra bien plus que la création de «pick post» et autres «automates à colis» pour calmer le mécontentement général. Il faudra que la Poste recommence à vouloir bien faire son travail, en respectant ses employés et les citoyens envers qui elle a des devoirs.

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