Édito

Le service civil attaqué

Obligation de servir

Le service civil est victime de son succès. De plus en plus de jeunes Suisses décident en effet de consacrer leur «obligation de servir» – une partie du moins – à se rendre utile auprès de la collectivité plutôt que de jouer à la guerre et exploser du matériel extrêmement coûteux dans des terrains vagues.

Or cette tendance fait enrager tout ce que le parlement compte d’amoureux de la grande – et très chère – muette. Non pas parce qu’ils considèrent le service civil comme inutile – il a en effet largement fait ses preuves et ils ont eux-mêmes, à l’occasion, vanté ses mérites – , mais tout simplement parce que la Suisse manque de soldats.

Ainsi, le Conseil national qui, on le sait, est replet de passionnés de l’armée, a voté jeudi – contre l’avis du Conseil fédéral – une motion visant à punir ceux qui décideront dans le futur de tomber l’uniforme pour servir la population plutôt que de continuer à répéter inlassablement des exercices inutiles au nom de la préparation pour une défense chimérique face à une improbable future invasion. En divisant par deux leur nombre de jours déjà effectués sous les drapeaux, comme l’a demandé hier le Conseil national, les futurs civilistes ayant effectué une partie de leurs obligations militaires verraient en effet leur service sensiblement allongé. Jusqu’à un facteur 195 dans le pire des cas! Contre 1,5 actuellement.

La volonté n’est pas nouvelle. Militaires et conservateurs réclament depuis un certain temps déjà un service civil moins «attractif». Il y a quelques mois, l’UDC demandait par exemple que les civilistes dorment en caserne et travaillent le week-end dans le but de dissuader les candidats.

Mais nos brillants stratèges se trompent une nouvelle fois de cible, et se tirent même peut-être une balle dans le pied. De nombreux jeunes n’ont simplement pas les yeux qui brillent à l’idée de se retrouver sous les drapeaux. Et ils sont encore plus nombreux à se rendre compte par l’exemple de l’inutilité de leurs séjours en caserne une fois dedans. Ainsi, en décidant de pénaliser les recrues qui s’en convainquent après avoir tout de même essayé l’armée, le parlement risque surtout de pousser les indécis à opter d’office pour le service civil.

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