Édito

Affaire Huonder: Pink Cross tient bon

Vendredi, le procureur du canton des Grisons classait les plaintes déposées contre Mgr Huonder. L’évêque de Coire avait été accusé d’incitation à la haine par l’association Pink Cross, pour avoir, lors d’un rassemblement catholique, cité des textes de l’Ancien Testament condamnant à mort ces auteurs «d’abominations» que sont les homosexuels. L’association a décidé de faire recours contre le classement de la plainte.

L’obstination de Pink Cross – comme le tollé médiatique suscité fin juillet par les propos de l’évêque – pose un geste face au pouvoir historique et tacite de l’Eglise catholique. Car si celle-ci respecte les institutions démocratiques, les inégalités qu’elle défend en son sein (l’inégalité de droits accordés aux femmes, les discriminations liées à la sexualité) interrogent sur sa compatibilité démocratique. A noter que c’est habituellement à l’islam qu’est réservée cette question et que les Lumières sont convoquées de toute urgence pour éclairer les textes saints. On imagine quel tapage aurait accompagné (venu d’autres milieux), la diffusion d’idées semblables à celles articulées par Mgr Huonder.

Malgré la sécularisation, le pouvoir de l’Eglise reste énorme. Sa criminalisation des moyens contraceptifs ou de l’avortement continue à malmener des pays entiers, dont les habitants ne se réclament pas tous, et de loin, des valeurs catholiques. Rome décide aussi qui est digne de fréquentation: en tout cas pas le diplomate gay que Paris voulait nommer au Vatican, avant d’y renoncer, semble-t-il, après des mois d’un silence éloquent de Rome. C’est pourtant de l’ambassadeur de France auprès du Saint-Siège qu’il est question, pas de l’inverse.

La position de l’Eglise sur l’homosexualité a été répétée par la Conférence des évêques suisses (CES) lors de la (nouvelle) «affaire» Huonder: elle prône l’accueil inconditionnel quelle que soit l’orientation sexuelle – doublé toutefois d’une exigence d’abstinence. Mais cette position vient d’être attaquée au sein de l’institution elle-même, où Krysztof Charamsa faisait jeudi dernier son coming out. Membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi (pas moins), il a qualifié d’«inhumaine» – pas moins – l’attitude de l’Eglise. Il a été démis de ses fonctions. En ouverture du synode sur la famille qui se tient jusqu’au 25 octobre, cette nouvelle pourrait marquer une désillusion dans l’espoir suscité par le pape François: l’institution qu’il dirige est prête à s’ouvrir mais à ses conditions.

Opinions Édito Dominique Hartmann

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