Le 20 juin 2012, des migrants éthiopiens sans papiers ont pris place à bord d’une embarcation et se sont lancés dans la traversée vers le sud du lac Malawi. Quelques minutes après leur départ, le bateau surchargé a coulé et 49 passagers se sont noyés. «Depuis la rive du lac, on pouvait apercevoir quelque chose qui ressemblait à un bout de papier flottant sur l’eau. Lorsque des pêcheurs sont allés vérifier en canoë, ils ont découvert plusieurs cadavres», raconte Grecian Mbewe, coordinateur d’un centre pour les droits de l’homme dans le district de Karonga, au nord du pays.
Joseph Mwandege1 value="1">Nom d’emprunt. dit appartenir à une organisation d’aide aux migrants originaires de la Corne de l’Afrique, qui traversent le pays pour se rendre en Afrique du Sud. Selon lui, la traversée du lac Malawi en bateau est devenue plus populaire lorsque les itinéraires terrestres sont devenus trop dangereux. «Nous travaillons avec un groupe de policiers. Ils nous conseillent sur les lieux les plus sûrs. Mais il arrive que des policiers ne faisant pas affaire avec nous installent des postes de contrôle. Dans ce cas, les migrants peuvent être interceptés à tout moment, car les itinéraires empruntés sont choisis sur la base de conseils fournis par nos amis policiers.»
Selon M. Mwandege, des groupes de migrants sont entrés au Malawi depuis la Tanzanie près du poste-frontière de Songwe, dans le district de Karonga. Avec l’aide d’agents de police, ils ont attendu la tombée de la nuit pour monter dans de petites embarcations et continuer leur voyage vers le sud. Après avoir contourné plusieurs postes de contrôle, ils ont accosté et se sont dirigés vers les collines environnantes pour se cacher.
Les évènements du 20 juin ont cependant attiré l’attention sur la question de l’immigration illégale. Sous la pression du président Joyce Banda, les services de police malawites ont pris des mesures contre les personnes soupçonnées d’être impliquées dans la noyade. Des policiers ont été suspendus de leurs fonctions ou transférés. Trois ont été jugés pour aide à l’immigration illégale et homicide.
Selon Solemn Chunga, porte-parole de la police du district de Chitipa, frontalier avec la Tanzanie, la campagne de répression policière a entraîné une modification des mouvements migratoires. Les migrants illégaux empruntent désormais des itinéraires dangereux à travers la brousse. D’après M. Chunga, l’une des principales zones est le parc national de Nyika, une réserve sauvage de 3 200 km2, située sur le plateau de Nyika, à environ 2600 m d’altitude. Le parc est noyé dans la brume une bonne partie de l’année et abrite un certain nombre d’animaux sauvages comme des léopards, des lions et des serpents. Depuis le mois de juin, la police de Chitipa a intercepté sept groupes de migrants se dirigeant vers Nyika. En septembre, 47 migrants et leur guide malawite étaient arrêtés alors qu’ils tentaient d’entrer dans le parc par le nord. La semaine suivante, 74 ont été surpris entassés à l’arrière d’un camion se rendant dans la même direction. Lors de l’interpellation, l’un des migrants a donné aux autorités un numéro de téléphone qui s’est révélé appartenir à un policier de Karonga…
Une fois arrêtés, les migrants sont traduits en justice et inculpés pour entrée illégale sur le territoire. Ceux sans papiers encourent une amende allant jusqu’à 71 dollars ou une peine de trois mois d’emprisonnement accompagnée de travaux forcés. Puis ils sont remis aux services d’immigration pour être expulsés, sans être nécessairement renvoyés dans leur pays d’origine. Parmi les migrants expulsés en Tanzanie, ceux interceptés par la police tanzanienne passent plusieurs mois en prison avant d’être rapatriés dans leur pays.
Les groupes de migrants qui transitent par ces itinéraires comprennent souvent des demandeurs d’asile et des migrants économiques. Il est difficile de distinguer ceux pouvant prétendre au droit d’asile de ceux soumis à la législation locale, relève le HCR.
Notes