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Repenser la pauvreté urbaine

AGORA DÉVELOPPEMENT • Conçus sans concertation, en déconnexion des réalités du terrain, les outils qui mesurent la pauvreté urbaine au Sud sont «inappropriés», selon une étude de l’IIED.

Les efforts pour éradiquer la pauvreté urbaine échouent, car les décisionnaires, au sein des organisations humanitaires et des gouvernements, ne comprennent pas toujours sa logique. C’est le constat qui se dégage d’une récente publication de l’Institut international de l’environnement et du développement (IIED). S’appuyant sur vingt années de recherche, l’ouvrage, intitulé Urban Poverty in the Global South: Scale and Nature (La pauvreté urbaine dans l’hémisphère sud: ampleur et nature du problème) décrit comment la gravité de la pauvreté urbaine en Afrique, dans la majeure partie de l’Asie et de l’Amérique latine, est grandement sous-estimée, du fait de définitions et d’instruments de mesure inadéquats.

Selon les auteurs, «le recours à des définitions inappropriées de la pauvreté, qui sous-évaluent et donnent une image trompeuse de la pauvreté urbaine, contribue à expliquer pourquoi la réduction de cette dernière a fait l’objet de si peu d’attention de la part des agences humanitaires et des banques de développement».

Sur terre, une personne sur sept est en état de pauvreté urbaine; un grand nombre vivant dans des campements de fortune au système d’eau potable et d’assainissement défectueux et aux installations sociales et médicales inadaptées. Les critères simplistes utilisés pour définir la pauvreté tels que le revenu ou la nutrition – y compris le célèbre seuil de pauvreté d’un dollar par jour et par personne – trahissent une mauvaise compréhension du problème.
«Si nous utilisons un instrument de mesure monétaire pour définir et évaluer les revenus ou consommations insuffisants… cet instrument doit refléter le coût des besoins alimentaires et non alimentaires», selon Diana Mitlin, une des auteurs du rapport. Ainsi, une vision portant seulement sur la pauvreté monétaire peut signifier qu’un ménage à faible revenu qui vit en sécurité dans une maison et bénéficie d’un approvisionnement en eau, d’un système d’assainissement de qualité et dont les enfants sont scolarisés, sera considéré comme aussi pauvre qu’un ménage à faible revenu qui ne possède aucun de ces avantages, relèvent les auteurs.

Par ailleurs, «presque tous ces instruments de mesure officiels de la pauvreté urbaine sont décidés sans concertation avec ceux qui vivent dans la pauvreté». De fait, ce sont toujours les experts qui identifient les gens «pauvres» et susceptibles d’être «ciblés» par un programme. Dans le meilleur des cas, ces derniers «deviennent ‘objets’ d’une politique gouvernementale qui peut améliorer leurs conditions dans une certaine mesure, mais ils sont rarement perçus comme des citoyens qui ont des droits et des revendications légitimes, ainsi que des ressources et des aptitudes pouvant contribuer à des programmes
de réduction de la pauvreté plus efficaces».
 

* Agence du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU.