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Le Courrier L'essentiel, autrement

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Il ne faut pas jouer avec les mots

Jacques Pous qualifie avec des termes précis la politique menée par l’Etat israélien.
Conflit

Le colonialisme de remplacement n’est pas une invention linguistique mais une réalité qui s’inscrit dans les faits depuis au moins le Mandat britannique et qui est en train de vider la Palestine de ses Palestiniens. Faudra-t-il qu’il ne reste en Palestine pas plus d’Indiens qu’en Amérique pour que la communauté des historiens découvre que le projet national du sionisme ne pouvait être que colonial puisque les sionistes voulaient créer leur Etat en Palestine qui n’était pas une terre sans peuple – et ils l’ont su tout de suite – et que ce colonialisme ne pouvait être qu’un colonialisme de remplacement car son objectif final était de créer un Etat juif avec le moins possible de Palestiniens.

C’est contre cette déportation finale génocidaire que nous devons lutter et non prioritairement contre une politique d’apartheid qui se réduit à une ségrégation provisoire car les colons juifs veulent se débarrasser des autochtones palestiniens alors que les Boers voulaient surtout qu’ils restent, mais séparés (séparation raciale et civilisationnelle dépendante du développement différent des deux peuples) car ils en avaient besoin!

Il ne faut pas jouer avec les mots qui sont supposés dire le vrai. La politique menée par Israël n’est pas une politique d’apartheid mais de ségrégation provisoire en attendant que les circonstances se prêtent à l’expulsion et au remplacement. De même, le colonialisme de remplacement n’est pas un projet colonial qui consisterait à utiliser un certain nombre de moyens comme la ségrégation ou le nettoyage ethnique pour s’approprier les bonnes terres. Son objectif n’est pas de peupler le pays mais de le peupler de Juifs. Il ne veut pas davantage exploiter en priorité le travail des autochtones mais éviter leur concurrence et préserver la force de travail des colons avec les terres leur appartenant qui ne doivent t être travaillées que par les Juifs. Lors du Mandat britannique, un seul mot d’ordre, Avoda Ivrit– «travail hébreu», – de la Histadrout, préconisait de réserver la totalité du marché du travail à la seule main d’œuvre hébraïque. De même, les territoires achetés ou occupés devaient rester juifs, selon le principe: «Tout ce que j’occupe est à moi, tout le reste est négociable.»!

Lorsqu’on aura compris cette réalité et que l’on sera prêt à n’utiliser que le vocabulaire ad hoc, il sera possible de cerner contre quoi (un colonialisme de ségrégation, d’expulsion et de remplacement) nous luttons et pour quoi nous militons: la disparition de l’Etat d’Israël et la création de l’Etat palestinien voulu démocratiquement par les Palestiniens et c’est eux qui diront aussi quelle réalité d’Etat ils veulent.

Jacques Pous,
Genève