Skip to content

Le Courrier L'essentiel, autrement

Je m'abonne

Palestine, on ne lâche rien!

L’organisation de la solidarité internationale avec la Palestine constitue, au sein de nos sociétés occidentales, également un tremplin à «la revitalisation de nos propres structures de résistances locales», considère Joseph Daher. Analyse.
Résistances

A la suite de l’accord de cessez-le-feu dans la bande de Gaza, des images de joie de Palestinien·nes et leur retour dans leurs régions détruites ont été largement diffusées. Il est normal qu’une population meurtrie, qui a résisté à plus de deux ans de guerre génocidaire, se réjouisse de cette annonce. Cependant, le combat pour la réalisation des droits fondamentaux du peuple palestinien reste plus que jamais d’actualité.

Tout d’abord, les attaques israéliennes meurtrières contre les Palestinien·nes se poursuivent malgré le cessez-le-feu (au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes). Il n’existe aucune garantie qu’elles ne cessent au vu des déséquilibres des forces en faveur des forces armées israéliennes et de l’impunité dont elles jouissent. De plus, l’accord promu par le président Trump menace toujours davantage les intérêts du peuple palestinien et son droit à l’autodétermination. Le plan en vingt points du président étasunien promeut des dynamiques coloniales, via notamment la mise en place d’un Comité de la paix présidé par Trump lui-même, qui supervisera un comité palestinien «technocratique et apolitique» chargé de la gouvernance de Gaza, sans oublier le déploiement d’une force de sécurité internationale et le désarmement de la résistance palestinienne… En même temps, le plan Trump ne fixe aucun calendrier pour le retrait des forces d’occupation israéliennes, tout en permettant à Tel Aviv de maintenir le contrôle d’un «périmètre de sécurité» le long des frontières de Gaza aussi longtemps que les dirigeants israéliens l’estimeront nécessaire. Par ailleurs, aucune mention de la Cisjordanie occupée, du droit au retour des réfugié·es palestinien·nes ou de la fin du régime d’apartheid israélien. Finalement, le plan Trump est également un moyen pour poursuivre le processus de normalisation de l’Etat d’Israël avec les pays régionaux.

Dans ce contexte, le maintien et l’intensification des mobilisations populaires et des campagnes, en Suisse et ailleurs, pour dénoncer les politiques mortifères des autorités coloniales israéliennes soutenues par les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux, avec la complicité des Etats régionaux, sont indispensables. Il ne faut pas s’attendre à ce que l’impunité de l’Etat colonial israélien ou le soutien des classes dirigeantes occidentales envers Tel Aviv cessent, particulièrement après le cessez-le-feu et le plan Trump, sans une pression continue et amplifiée à travers le monde.

Dans ce cadre, le meilleur moyen de soutenir l’autodétermination du peuple palestinien et de ses droits fondamentaux ne commence pas par la reconnaissance d’un Etat imaginaire. La priorité reste la mise en place de mesures visant la rupture de toute relation politique, économique et militaire avec Tel Aviv et l’imposition de sanctions contre les autorités coloniales israéliennes et les institutions complices, comme promu par les campagnes de «Boycott, désinvestissement, sanctions» (BDS). Rendons infréquentable Israël, car il est en effet anormal de maintenir des relations avec un Etat génocidaire et d’apartheid.

Pour réaliser ces objectifs, continuons à multiplier et à diversifier nos formes de résistance et nos moyens d’actions avec, comme ambition principale, l’extension et la massification du mouvement international de solidarité avec la Palestine. Luttons pour promouvoir l’organisation collective la plus large possible au sein de nos sociétés et sur nos lieux de travails pour faire pression sur nos classes dirigeantes. La mobilisation internationale a pris une ampleur sans précédent avec les occupations étudiantes, les grèves, les campagnes de boycott, les flottilles de la liberté, les marches pour Gaza… Les récentes grèves de solidarité en Italie sont à cet égard un exemple et une inspiration militante à développer, qui combine à fois participation populaire massive et pression sur les classes dirigeantes en visant le blocage de l’économie.

Finalement, chose souvent ignorée, l’organisation dans nos sociétés de la solidarité internationale avec la Palestine a permis et permet la revitalisation et la reconstruction de nos propres structures de résistances locales pour défendre les droits de tou·te·s celles et ceux qui s’engagent dans la lutte contre ce système mondial autoritaire et inégalitaire.

En luttant pour la Palestine, celle-ci nous offre également les moyens de penser et construire une société alternative démocratique et égalitaire. Nos destins sont liés.

Joseph Daher est Universitaire spécialiste du Moyen-Orient. Auteur de Gaza: un génocide en cours, Syllepse, 2025.