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Lourde bureaucratie

Daniel Künzi se montre critique vis-à-vis du système et des organes d’attribution des aides au cinéma suisse.
Cinéma

Le réalisateur Samir s’exprime dans une page du Courrier du 1er septembre au sujet du problème de la bureaucratie qui règne sur le cinéma suisse. A propos notamment des salaires des «administrateurs», dont rêvent les créateurs. Il ajoute: «Il existe de nombreux autres exemples illustrant comment l’administration alourdit la bureaucratie (…)». Et il pointe du doigt les diverses commissions sélectives: «Mais voilà que l’OFC veut désormais dicter aux cinéastes le type de films qu’ils doivent produire.»

Concrètement, concernant les frais de gestion, mon collègue aurait aussi pu citer Cinéforom. Son budget de fonctionnement était de 683 453 francs en 2023, il a passé à 739 668 francs en 2024. Soit une augmentation de 56 215 francs, près de 10%1> CINEFOROM-Rapport-annuel-2024.pdf.

Il faut aller jusqu’au bout du raisonnement: ces administrateurs et autres experts exercent une censure qu’ils le veuillent ou non. Ils justifient leur existence en prétendant qu’ils choisissent les meilleurs films, ceux qui ont le plus de chance de trouver un public, etc.

La réalité a prouvé le contraire. On se souvient par exemple du film Mein Name ist Bach, rejeté par les experts, qui remportera le Prix du cinéma suisse, ou encore le film On dirait le Sud, qui a aussi gagné ce prix sans passer par les experts. Mais plus récemment, à l’inverse, j’ai vu un film béni par les «experts» dont le coût total a été de 4 268 254 millions, Jungle rouge, une coproduction helvetico-française. Vu par 726 spectateurs (6 168 en France). Là encore, aucun des fameux experts de Cinéforom, qui a participé au financement, n’a été prié de démissionner à ma connaissance.

Le 5 septembre, Mathieu Loewer, est revenu dans vos colonnes sur le cinéma en Romandie, et a pertinemment analysé les problèmes de distribution de certains films étrangers de grande qualité dans nos salles2> A noter à Genève le cinéma CDD qui projette des films souvent boudés par les grandes salles.. Il laisse dans l’ombre la question des films romands. Bien que Cinéforom se targue d’augmenter son aide à la distribution dans un récent article du Courrier, il n’en est rien. Au contraire, depuis 2024, Cinéforom ne soutient plus la distribution de tous les films romands. On ne parlera naturellement pas de censure déguisée.

Pour en revenir à la question de la bureaucratie qui empêche, à mon avis, un bon exercice de la démocratie et de la liberté artistique, il faudrait peut-être s’inspirer des principes de base du Fonds Regio, l’ancêtre de Cinéforom, dont j’étais membre du comité. Un permanent, à mi-temps, gérait le cinéma romand. Mais me direz-vous, comment sélectionner les films? Laissez cette tâche au public: il suffit d’attribuer à chaque projet le même montant, et ensuite récompenser les films qui auront trouvé leurs spectateurs. C’est l’œuf de Colomb.

Daniel Künzi,
cinéaste, Genève

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