Cher Confrère, cher Elie,
L’ASI – Association Suisse Israël – a organisé une manifestation le 18 septembre à Lausanne sous le slogan: «Pour Israël, contre l’antisémitisme». Condamner les actes antisémites est juste, au même titre que lutter contre toute violence qui frappe un groupe de personnes indistinctement.
Avant cette manifestation, tu as lancé un «appel au calme», dans les médias. Tu t’y offusquais, en tant que Président de la communauté israélite de Lausanne et du canton de Vaud, que les autorités tolèrent une contre-manifestation dont le but serait « d’empêcher des citoyens qui ne pensent pas comme eux de s’exprimer».
En démocratie, exprimer son désaccord de manière pacifique est un droit fondamental. Amnesty International section suisse a fait part de sa «vive préoccupation» suite au blocage de la contre-manifestation de jeudi: «les contre-manifestations pacifiques doivent pouvoir se tenir à portée de vue et d’ouïe de la manifestation qu’elles visent à critiquer».
Mais surtout. Deux jours avant la manifestation, l’ASI niait le génocide et la famine à Gaza. Cette position tu la défends dans ton appel en ces termes: «personne n’est capable aujourd’hui de dire s’il y a un génocide et une famine organisés à Gaza».
Personne?
N’as-tu pas entendu la Commission d’enquête indépendante du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, la Cour pénale internationale, B’Tselem (our genocide1>https://www.btselem.org/publications/202507_our_genocide), Amnesty International, Emmanuel Macron, Ruth Dreifuss, l’Afrique du Sud et tant d’autres?
Ne pas vouloir les écouter, c’est s’empêcher de comprendre les raisons de la contre-manifestation. C’est ignorer délibérément que «Pour Israël» puisse être perçu comme «Pour la politique de destruction du peuple palestinien». En démocratie, n’est-il pas indispensable de s’opposer à une manifestation négationniste?
Nous n’avons pas le temps d’attendre le jugement de l’Histoire pour déterminer la nature des crimes commis, comme tu le suggères. En tant qu’avocat, tu sais qu’il faut faire respecter le droit international, notamment la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide. C’est cela que demandent les contre-manifestant·es. Que cette modeste tribune puisse être leur voix.
Tu accuses les contradicteur·rices de faire partie de mouvements pro palestiniens qui seraient alignés sur le Hamas. Suite à l’assassinat de Charlie Kirk, Trump a qualifié les démocrates de terroristes. Ces amalgames ne reflètent pas les valeurs du dialogue, de l’échange et de la recherche du consensus que tu préconises.
A titre personnel, comme tant de gens, je suis atterrée par les crimes commis en Israël et dans le Territoire palestinien occupé. Il est juste que la Suisse ait condamné fermement les attaques terroristes brutales menées par le Hamas. L’absence de pareille condamnation à l’encontre des actes commis par le gouvernement israélien m’apparaît inéquitable et choquante.
Ce n’est donc pas un appel au calme qui doit être lancé aujourd’hui. C’est un appel à l’action de notre gouvernement pour qu’il entreprenne tout ce qui est en son pouvoir pour qu’il soit mis fin à ce génocide.
Sinon, le calme que nous aurons sera celui des cimetières.
Notes