D’aucun·es diront que ce n’est pas une surprise. D’autres encaisseront le choc avec consternation. Les autorités, elles, semblent prendre la mesure du problème de «discrimination systémique» qui gangrène la police lausannoise. En communiquant ce lundi sur les messages racistes, sexistes, antisémites et validistes que s’échangeaient des dizaines d’agents sur des groupes WhatsApp, la Municipalité montre une volonté d’empoigner le problème. Elle suspend quatre agents et prône une «réforme en profondeur». Dire qu’il y a urgence est un euphémisme.
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Car comment patrouiller dans les rues, effectuer des contrôles et réprimer les infractions avec toute la légitimité requise, quand une proportion non négligeable des fonctionnaires chargé·es de ces tâches sensibles prennent pour cible des catégories entières de la population, les plus fragiles ou exposées aux injustices?
En découvrant ces messages et photo-montages, la colère le dispute au dégoût. Comment en est-on arrivé là? Comment une culture machiste, brutale, suprémaciste, a-t-elle pu prospérer dans les rangs de la fonction publique, sans qu’aucun signalement ne remonte à la hiérarchie? Et comment admettre que des individus faisant l’apologie du nazisme, méprisant les minorités et les femmes, puissent être amenés à intervenir dans des situations de violence de genre, au contact de personnes racisées ou LGBT, ou bien lors de manifestations politiques en faveur de causes à l’exact opposé de ces discours de haine?
Le fait que ces révélations soient liées à l’affaire Mike Ben Peter est révélateur: c’est en effet la diffusion d’une photo montrant un policier, pouce levé, devant un graffiti en hommage au Nigérian décédé en 2018 après son arrestation, qui a entraîné le dépôt d’une plainte par l’avocat du défunt. Permettant de mettre à jour l’existence de ces groupes WhatsApp. Rappelons que, depuis 2016, cinq personnes noires ont perdu la vie lors d’interventions policières dans le canton de Vaud, sans qu’aucune condamnation n’ait été prononcée. Chaque fois, l’explication de l’accident ou de la légitime défense a prévalu.
Hasard du calendrier, c’est aussi ce lundi qu’ont été présentées les conclusions de la contre-enquête de Border Forensics sur le cas Nzoy, Zurichois d’origine sud-africaine abattu par un policier en 2021 à Morges. L’analyse des images par ces expert·es contredit la thèse officielle et pointe la perception biaisée de la victime par les policiers.
Au lendemain d’une course-poursuite fatale pour un jeune de 17 ans, ce sont aussi bien les biais de perception que les méthodes d’intervention – bref, toute une culture policière – qu’il faut revoir de fond en comble. Sans blocage, avec entière coopération.