La Petite Maisonnée, un lieu unique qui a fait le bonheur de tant d’enfants, est désormais fermée. Dans son parc accueillant, nous n’entendrons plus les joyeux éclats de voix des enfants mêlés aux chants des oiseaux… Au-delà de ces considérations nostalgiques, empreintes d’émotions liées à ce que nous sommes nombreux et nombreuses, tant parents que membres du personnel, actuel·les et ancien·nes, à considérer comme une aberration, rappelons-nous ce que fut cet endroit.
Créée en 1915, La Petite Maisonnée a été installée en 1951 en son lieu actuel, une ancienne maison bourgeoise, sise à la route de Ferney. D’abord pouponnière, ses prestations se sont étendues: école de nurses, internat, jardin d’enfants, crèche. Elle est entrée en tant que crèche dans le «Secteur petite enfance de Budé» en 2014. A chaque étape de son histoire se sont inscrits des changements pensés en faveur du bien-être des enfants et de leur développement.
Ses murs protecteurs auraient beaucoup à raconter, c’est une des raisons pour laquelle nous y sommes si attaché·es, eux qui ont accueilli tant d’enfants et soutenu leurs parents, porté notre labeur et nos réflexions.
Bien que vétuste, l’aile reliée à la maison principale a été rénovée il y a une vingtaine d’années. Les rénovations réalisées de concert avec l’équipe éducative ont permis l’adoption d’un projet pédagogique correspondant aux besoins des bébés et des jeunes enfants. Une collaboration entre architectes et professionnel·les de la petite enfance étant essentielle dans la recherche des solutions en adéquation avec les besoins des enfants.
Quitter la Petite Maisonnée est un deuil en raison de cet endroit exceptionnel et aussi pour tout ce qui s’est construit en équipe sur le plan pédagogique. Est-ce que l’arcade prévue pour accueillir désormais les enfants permettra de poursuivre l’approche pédagogique peaufinée au cours des ans? L’équipe éducative ayant été peu associée à son aménagement s’en inquiète à juste titre et se sent dépossédée de ce qui est sa valeur première: le bien-être des enfants.
Il s’agit de trouver des ajustements précis qui permettent à l’enfant d’exercer son autonomie selon son âge, sans entrave et avec plaisir. Cela concerne tous les moments de la vie quotidienne. Par exemple en ayant des lavabos à sa hauteur. Ou encore prendre son repas dans une ambiance calme, ce qui est favorisé par des petits groupes et compliqué, voire impossible, dans un réfectoire, etc.
Gageons que l’équipe éducative, riche de ses compétences et de son expérience, saura trouver au mieux les alternatives favorables aux besoins des enfants. Cependant, est-ce qu’un changement si radical en valait la peine, sachant que la conception du lieu-même influe sur la réalisation des options pédagogiques? Ne serait-ce pas aux locaux de s’adapter aux enfants plutôt que l’inverse?
A l’origine de nombreux projets, de recherches et de parutions, La Petite Maisonnée a été un lieu inspirant: dont La Crèche aérée (Label petite enfance Ville de Genève) et Le Langage des adultes adressé aux enfants (Prix Unicef). «La Petite Maisonnée est un de ces lieux à protéger. Il est connu et reconnu dans le monde sur la scène internationale», selon Martine Boden, directrice de la crèche Pikler Herstal, une référence en Belgique.