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Des couleuvres à avaler. Ou pas.

Martin Pfister et Urs Loher, aujourd'hui à Berne. KEYSTONE
Suisse

Un Conseil fédéral en roue libre ou en train de tenter de profiter de la torpeur caniculaire? Difficile de trancher. Mais, en tous les cas, il a pris hier une série de décisions qui marquent sa droitisation, voire son extrême droitisation: retour en grâce du nucléaire, acceptation de la toute-puissance étasunienne avec le lourd dossier du dépassement de crédits des F-35 et discours pour le moins ambigu sur l’avenir du service public postal.

Sur le dossier de l’énergie, l’exécutif fédéral rompt définitivement avec la doctrine de l’abandon progressif du nucléaire. Dans son message au parlement sur le contre-projet à l’initiative populaire «Stop au blackout», il ouvre explicitement la porte à la construction de nouvelles centrales atomiques.

Et tant pis s’il s’agit d’une technologie du passé, que le problème des déchets n’est toujours pas résolu et que cela bloque les investissements dans des modes de production durables. Et surtout, il s’assied sur le vote populaire.

Hier, il a aussi basté sur l’affaire du dépassement des crédits des avions de combat F-35. Le surcoût pourrait être de 1,3 milliard de francs sur un budget de 6 milliards. Une paille. Avec un discours lunaire: pour le ministre de la Défense Martin Pfister, «la Suisse considère toujours que le contrat conclu avec Washington contient un prix fixe». «Mais l’autre partie ne l’accepte pas et l’autre partie est plus puissante.»

Enfin, sur le dossier de la Poste, dans le cadre de la révision du cadre législatif, le service public postal devrait être garanti mais avec «une certaine flexibilité». De quoi nourrir quelque inquiétude. D’autant plus que dans une étape intermédiaire, le Conseil fédéral a déjà prévu d’accorder davantage de flexibilité à la Poste, en permettant un assouplissement des délais de livraison des lettres, des colis et des quotidiens ou la fin de l’obligation de distribuer dans les habitations isolées…

Ces nouvelles orientations s’inscrivent dans un cadre politique précis: le déficit budgétaire annoncé de 800 millions de francs sera moindre. Les dernières projections tablent sur un découvert de 200 millions. Mais pas question de renoncer aux coupes déjà annoncées et qui frapperont les plus défavorisé·es.

Il s’agit bien de choix politiques. Qui ne sont pas forcément ceux de la population. Un sondage publié hier montre que deux tiers des Suissesses et des Suisses estiment qu’il ne faut pas s’aplatir devant l’Oncle Sam. C’est pourtant ce que le gouvernement suisse a fait. Cela met juste en évidence que l’alliance entre libéraux-radicaux et udécistes qui permet ces coups de force est redoutable. Mais fragile, aussi. Elle peut et doit être défaite, notamment dans les urnes.