Autour d’un café, dans le cadre familial ou amical, qui n’a pas entendu d’affirmations audacieuses sur le nucléaire? Depuis que le conseiller fédéral Albert Rösti promeut une relance de cette énergie, l’idée qu’elle serait propre, abordable ou à portée de main gagne du terrain. A y regarder de plus près, c’est sur des fake news et les phantasmes techno-solutionnistes que repose la relance de cette industrie.
«C’est le printemps du nucléaire!»: FAUX
Depuis 2000, la part du nucléaire dans la fourniture mondiale d’électricité a passé de 16,6% en 2000 à 9,1% en 20231>tinyurl.com/37kkusc8. Pendant la même période, les renouvelables sont passés de 19 à 30%. En Suisse entre 2000 et 2023, le nucléaire est passé de 40% à 35% et les renouvelables de 60 à 65%. C’est donc le printemps des renouvelables et l’automne du nucléaire.
«Les mini-réacteurs nucléaires, c’est l’avenir»: FAUX
Il n’existe pas de mini-réacteur (SMR) en fonctionnement prouvant que cette technologie serait viable. Plus petit ne veut pas dire moins cher et les défauts (déchets, accident) seraient les mêmes que pour les grandes centrales. Mieux vaut investir dans des solutions efficaces et déjà accessibles.
«L’Allemagne renoue avec le charbon»: FAUX
L’Allemagne développe ses capacités renouvelables à une telle cadence que la sortie du nucléaire, terminée en 2022, se double d’un plan de sortie des fossiles en cours.2> tinyurl.com/yufhshc6 La sortie du charbon serait plus rapide en maintenant le nucléaire, mais c’est bien une diminution de la part du charbon qui est observée. En Suisse, le remplacement du nucléaire est planifié avec une maîtrise de la consommation et un développement des renouvelables, pas avec du gaz ou du charbon.
«Le nucléaire, c’est l’indépendance»: FAUX
Le minerai d’uranium est importé de pays vulnérables aux tensions géopolitiques. Le minerai doit être enrichi et c’est la Russie qui nous fournit la moitié des besoins suisses en uranium enrichi3>tinyurl.com/22kvrkd7! Le nucléaire suisse finance donc la guerre de Poutine en Ukraine. Au contraire, les renouvelables fonctionnent sans combustible fossile ou radioactif, s’alimentant du rayonnement solaire, de la gravité (hydro) et du vent!
«Sans nucléaire, c’est le black-out»: FAUX
La fermeture de la centrale de Mühleberg a été plus que compensée par le développement du solaire en Suisse, qui atteint 10% de la production en 2023, ce qui a permis à la Suisse d’exporter plus d’électricité qu’elle n’en a importé. Le tournant énergétique sécurise l’approvisionnement énergétique! Grâce aux capacités de stockage alpin, la combinaison solaire, éolien et hydraulique assurera un approvisionnement douze mois par an.
«Les centrales au thorium, c’est l’avenir»: FAUX
Il n’existe pas de prototype de centrale au thorium en état de marche aujourd’hui. Des recherches sont en cours pour aboutir peut-être un jour à des centrales nucléaires au thorium sans risque d’accident, qui utilisent et réduisent la durée de toxicité des déchets accumulés jusqu’ici. Si cette technologie voit le jour, elle sera plus chère que le nucléaire actuel et, au mieux, se développera en marge. Mieux vaut investir dans des solutions efficaces et déjà accessibles.
«La panne espagnole est due au solaire»: FAUX
Le 28 avril dernier, l’Espagne a subi les conséquences d’une panne de courant généralisée. A ce moment-là, le pays exportait de l’électricité vers la France. Des pays comme le Danemark et l’Allemagne peuvent atteindre jusqu’à plus de 90% de renouvelables dans leur mix d’électricité les jours de forte production, sans panne.
Le rapport de l’enquête gouvernementale espagnole a conclu à un problème de surtension du réseau qui n’a rien à voir avec les renouvelables4>tinyurl.com/panne-esp-rapport.
«Le nucléaire est moins cher»: FAUX
Selon l’Agence gouvernementale de l’information sur l’énergie des Etats-Unis (USEIA), un pays connu pour être pronucléaire, mais à cheval sur la vérité des prix, l’électricité fournie par une nouvelle centrale nucléaire coûte plus du double (110 dollars/MWh) de l’électricité provenant d’une centrale renouvelable (solaire: 55 dollars/MWh; éolien onshore: 40 dollars/MWh). L’USEIA prévoit aussi que, d’ici à 2050, le coût du nucléaire restera stable et celui des renouvelables diminuera de 50%. Ce calcul comprend les coûts additionnés de la construction et du combustible pendant la durée de vie de l’installation, mais ne comprend pas le démantèlement, ce qui aggraverait le coût du nucléaire. Le nucléaire n’est pas une énergie économiquement compétitive5>tinyurl.com/useia-nuc-renouv-2025.
«Le nucléaire est sûr»: FAUX
Les Japonais, comme nous aujourd’hui, étaient persuadés d’avoir les centrales les plus sûres. Après Fukushima, il leur a fallu reconnaître que les mises en garde étaient fondées! Se prétendre meilleurs que les Russes ou que les Japonais, c’est faire comme eux, c’est continuer le jeu de la roulette russe en affirmant qu’il n’y a pas de balle. En Suisse, il n’y a pas d’océan vers lequel le gros du nuage de radioactivité pourrait s’évacuer. Les matériaux de nos centrales vieillissent et se fragilisent, la catastrophe est possible à tout moment et surviendrait dans la partie la plus densément peuplée et bâtie du pays!
«La question des déchets est réglée»: FAUX
L’industrie ne peut pas garantir que les déchets nucléaires resteront isolés dans leurs fûts sur une période de 500 000 ans. L’enfouissement profond prévu par la Confédération serait une erreur grave, car on ne pourrait pas revenir en arrière en cas de problème avéré ou de solution trouvée pour traiter les déchets. De plus, des géologues avertissent que le forage de centaines de kilomètres de tunnels à 500 mètres de profondeur créera à terme des fissures dans la roche et des infiltrations d’eau. Or, le contact des fûts avec l’eau est l’ennemi du confinement et aboutirait inexorablement à une pollution des nappes phréatiques6>tinyurl.com/nuc-geologie-critique.
Autrement dit, le nucléaire est le sujet de promesses aussi séduisantes qu’illusoires. En réalité, cette énergie est coûteuse, risquée et maintien la dépendance envers l’uranium acheté à l’étranger. A l’inverse, la sobriété, associée aux énergies renouvelables, représente un avenir crédible, tout en créant des emplois locaux. Chaque kilowattheure compte, chaque décision aussi!
Notes