Dorogoy Vladimir P*, dear Donald T*, yakar Benyamin N*, aziz Ali K*,

Je voudrais beaucoup vous inviter chez mon oncle. Figurez-vous, que, très doué question travaux pratiques et fameux bricoleur, il fabrique en amateur des bombes atomiques. Or je sais, dorogoy Vladimir, dear Donald, yakar Benyamin, aziz Ali, que celles-ci vous intéressent fort.

Bon, depuis des années, entre deux assiettes de soupe aux vermicelles, mon oncle essaie d’augmenter la portée de sa bombe, tout en venant seulement de se rendre compte que le plus important est… l’endroit où elle tombe! Je ne doute pas un instant que pour votre part, vous y avez pensé, dorogoy Vladimir, dear Donald, yakar Benyamin, aziz Ali.

Quoiqu’il en soit, mon oncle a bossé pendant des jours et tâché avec amour d’améliorer le modèle. Du coup, le résultat est proche, et mon oncle vous invite donc, dorogoy Vladimir, dear Donald, yakar Benyamin, aziz Ali, à une petite sauterie. Il s’excuse par avance de ce que sa cagna est assez petite, mais vous ne serez pas là pour danser la java, quoique…

Dans sa chanson de 1955, «La Java des bombes atomiques», ce cher Boris Vian (et là le «cher» est sincère, malgré que je l’aie largement pillé jusqu’ici), raconte que son oncle avait alors enfermé tous les grands chefs d’Etat lui ayant rendu visite et que, lorsque la bombe avait éclaté, de tous ces personnages il n’était plus rien resté. Et d’ajouter qu’en détruisant tous ces tordus, il était bien convaincu d’avoir servi la France.

Alors moi, septante ans plus tard, je me demande, dorogoy Vladimir, dear Donald, yakar Benyamin, aziz Ali, si vous deviez sauter en même temps que la bombe de l’oncle de Boris, cela ne servirait pas… le monde entier, car, comme tordus, vous vous placez là, dorogoy Vladimir, dear Donald, yakar Benyamin, aziz Ali…

Eric Monnier,
Genève, en hommage à Boris Vian