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Redonnons du sens à l’inclusion

Francisco Taboada, habitué des compétitions, livre le récit de sa participation à un récent marathon.
Sport

Dimanche 11 mai, j’ai couru le semi-marathon de Genève, en tant que non-voyant, guidé par un athlète de haut niveau.

Avant de poursuivre, je tiens à féliciter les organisateurs pour avoir instauré, depuis quelques années déjà, un départ pour les fauteuils roulants sur la distance du semi-marathon.

C’est un beau geste pour l’inclusion, qui doit absolument se poursuivre.

En ce qui me concerne, avec mon guide, nous avons pris le départ dans le premier sas avec le reste des coureurs.

Cette course a été plus qu’une performance: elle a été un moment de communion. Avec les autres coureurs. Avec le public. Avec mon guide.

Habitué des compétitions sur route avant le Covid, je m’étais ensuite recentré sur la piste pour préparer les Jeux paralympiques. Revenir sur cette distance en ville fut pour moi un moment fort, humainement et symboliquement. Quand les gens te voient courir à 15 km/h, leur regard change. Mais au fond, je suis la même personne, que je coure à 15 ou à 10 km/h.

A mes yeux, la performance réalisée par l’ensemble des coureurs en franchissant la ligne d’arrivée mérite d’être valorisée.

C’est ce regard qui m’interpelle. Lorsque je suis perçu comme entrepreneur ou député, les regards changent encore. Pourtant, je ne change pas. Je reste ce que je suis: un homme engagé, un père, un citoyen, un sportif, et une personne non-voyante.

Notre société continue de mettre les gens dans des cases. C’est une erreur. Ce cloisonnement empêche de révéler le plein potentiel de chacun. Parce que je fais différemment, on me voit souvent comme une exception. Mais ce n’est pas la différence qui pose problème, c’est le regard qu’on lui porte.

Le sport, lui, remet tout le monde à égalité. Le bitume ne triche pas. Quand les kilomètres défilent, quand la souffrance physique commence à s’installer, il ne reste plus que l’humain. C’est là que naît la vraie inclusion. Une inclusion vécue, partagée, sincère.

Dans ma discipline, j’ai besoin de guides élite pour courir à haute vitesse. Cela demande une confiance absolue, de part et d’autre. C’est un lien rare. Pour ces athlètes, c’est aussi une autre manière de vivre la compétition, et d’être reconnus pour leur engagement.

J’aimerais que cette image inspire. Que l’on regarde l’autre avec bienveillance, quelles que soient ses compétences ou son parcours. Que l’on valorise la diversité dans le sport, l’entrepreneuriat, la politique comme dans la vie.

Nous avons vécu un moment d’unité pendant le confinement. Depuis, une forme d’individualisme semble avoir repris le dessus. Humblement, je souhaite que nos actions quotidiennes retrouvent ce souffle d’humanité et d’inclusion que j’ai ressenti avec tant de force dimanche à Genève.

«Ensemble, nous sommes plus forts.»

Francisco Taboada,
député, entrepreneur et athlète paralymique, Vessy (GE)