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Offensive trumpienne contre l’information

Membres de la presse admis dans le bureau ovale de la Maison blanche. KEYSTONE
International

Le droit de savoir et d’informer est dans le collimateur de Donald Trump. L’ONG Reporters sans frontières a dénoncé jeudi la croisade menée par le président orange contre ses bêtes noires: les journalistes et la «presse corrompue», selon ses propres termes.

Cette volonté de museler les médias prend plusieurs formes. A commencer par des procès intentés par le fascisant chef d’Etat contre des titres ayant divulgué des informations qui lui ont déplu. Par exemple contre le Des Moines Register, coupable à ses yeux… d’avoir publié pendant la campagne un sondage lui étant défavorable.

Il se lance aussi dans une chasse aux sorcières digne de la période maccarthyste. Mardi, l’agence de presse AP a été interdite d’un événement de la Maison Blanche. Son crime? Ses dépêches continuent d’utiliser l’appellation de golfe du Mexique plutôt que celui de golfe d’Amérique imposé par le révisionniste président étasunien.

L’affaire prend carrément une tournure dystopique ou orwellienne. C’est à une véritable épuration du langage que l’on assiste. Des termes comme «femmes» ou «climat» sont désormais bannis des publications scientifiques sous peine de risquer une suppression des financements de recherches1.

Une illustration que la liberté d’expression bruyamment revendiquée par le locataire de la Maison Blanche ne rime pas avec liberté de la presse. Au contraire.

Cette volonté de contrôler le langage a des relents sinistres. L’écrivain et philologue allemand Viktor Klemperer avait déjà décrit dans son ouvrage Lingua Tertii Imperii:  («Langue du Troisième Reich»), paru en 1947, les mécanismes rhétoriques du régime nazi et leur aspect révélateur de la nature profonde de ce dernier.

Pour délirante qu’elle soit, cette croisade trumpienne est un avertisseur d’incendie. Ce qui est en train de se jouer aux Etats-Unis est fondamental. Une lutte pour la démocratie, la préservation des libertés et le refus d’une dérive pouvant conduire vers un nouveau totalitarisme.

On a beaucoup glosé sur le geste d’Elon Musk à l’intronisation du président élu –salut nazi ou pas? – alors qu’il s’inscrit dans un contexte ne laissant guère de doute sur sa nature fascisante. La sentence du dramaturge Bertold Brecht, «Le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde», garde toute son actualité.

1Voir Reporterre, «’Femmes’, ‘Climat’, Trump interdit des mots dans les articles scientifiques», 12 février 2025. Et Libération, «Aux Etats-Unis, 8000 pages internet publiques supprimées au nom de la croisade idéologique de Donald Trump», 3 février 2025.