Le Conseil fédéral annonçait un budget 2024 dans le rouge, avec un déficit prévu de 2,6 milliards de francs. A l’arrivée, le découvert ne sera que de 80 millions de francs. En sus, la Confédération se permet le luxe de réduire la dette Covid, qui est de 27 milliards de francs, de 1,3 milliard.
On pourrait ironiser sur le stagiaire qui compile les chiffres de l’Etat fédéral. Ce n’est pas la première fois que Berne peint le diable sur la muraille avant de devoir battre en retraite. Rappelons-nous l’AVS, au bord du gouffre avant la votation, et puis, finalement, ce n’était pas si grave…
Plus sérieusement, ces discrépances semblent davantage relever d’une tactique politicienne. Le but étant de s’attaquer au rôle social de l’Etat au nom de l’orthodoxie comptable. Notamment via le paquet d’allègement budgétaire en consultation. Celui-ci prévoit de couper 2,7 milliards de francs dans le budget suisse en 2027 et 3,6 milliards en 2028.
Dans le collimateur: les contributions fédérales à l’AVS, les subsides aux assurances-maladie, l’aide au développement, le soutien aux victimes de violence, la formation, sans oublier des attaques contre les transports publics.
Dans le même temps, l’armée, elle, a open bar. Derrière ces économies, ce sont des fins de mois difficiles, un basculement dans la pauvreté de familles, des renoncements à des soins ou encore un obstacle mis à la démocratisation des études.
La réalité des chiffres annoncé mercredi n’a pas désemparé les spadassins du moins d’Etat qui ont continué à marteler leur mantra: il faut économiser, le déficit est structurel, voire même, pour l’Union suisse des arts et métiers, le bras armé de l’économie de l’UDC, aller plus loin et procéder à de «réelles économies».
On rappellera à ces tenants de la religion séculière des marchés que la dette suisse est relativement basse en regard de celles de nos voisins : 142 milliards, soit 17% du PIB suisse. En comparaison, ce ratio est de 100% en Allemagne et de 112% en France.
Mais si cette embellie budgétaire se maintient, ce qui rendra politiquement un peu moins aisé la sape de l’Etat redistributeur, la suite est déjà connue. Il suffira d’impulser de nouvelles baisses fiscales, au nom de la compétitivité de la place financière suisse ou autres fariboles. Et une fois que les chiffres afficheront de nouveau du rouge un tant soit peu vif, les coupes seront plus faciles à faire avaler au nom du « réalisme économique ».
Tant qu’elle gagne, la droite bourgeoise continuera sur cette voie. Il a été possible de lui bloquer la voie, notamment avec la treizième rente AVS. Le cycle infernal du démantèlement social n’est pas une fatalité. Il nous appartient, à toutes et tous, d’y mettre un terme.