La Suisse a besoin d’une trajectoire claire contre la corruption, selon Transparency International. L’ONG a publié mardi son classement annuel en matière de corruption1>Transparency International, Corruption Perception Index 2024.. La Suisse sort, certes, en cinquième position, mais est en recul d’un point par rapport à l’année précédente.
Le rapport 2023 pointait déjà de sérieux manques en matière de lutte contre la corruption en Suisse. Une entreprise sur trois avait alors admis avoir versé un pot-de-vin à l’étranger pour emporter un marché!
Cette année, ce sont les liens incestueux entre le secteur privé et l’administration fédérale qui sont scrutés. «La Suisse doit s’attaquer fermement aux lacunes de la lutte contre la corruption dans le secteur public – des mesures urgentes s’imposent notamment en ce qui concerne la gestion des conflits d’intérêts à tous les niveaux fédéraux et la régulation du lobbying», relève Katja Gloor, directrice ad interim de Transparency Suisse. «Une culture de la transparence et de l’intégrité doit être une exigence impérative dans le secteur public.» Cette critique, sévère, n’est pas pour étonner. La sensibilité de l’administration et du monde politique à la défense d’intérêts privés est régulièrement dénoncée. La crise du système de santé, le poids de la pharma et des assureurs pour bloquer toutes réformes ménageant le porte-monnaie des petites gens est là pour en témoigner.
Plus classique, le rapport pointe également de sérieuses lacunes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. «La Suisse reste un pays de destination et de transit attractif pour les flux financiers illégaux», selon Mme Gloor. Et d’exiger par exemple la transparence des ayants droit économiques des sociétés de trust. Trop d’officines d’avocats servent encore de simples prête-noms, comme l’ont révélé les Panama Papers.
Enfin, on relèvera dans cet intéressant rapport le lien tracé entre corruption et crise climatique. Le poids du lobby des énergies fossiles sabote la mise en œuvre d’une politique permettant de contenir le réchauffement de la planète. Parfois en recourant à de la corruption directe, y compris dans des pays du Nord.
Là-aussi, le poids des lobbies est jugé problématique et le rapport relève d’inquiétants allers-retours du secteur privé vers le secteur public, un syndrome dit des portes tournantes.
En Suisse, on en a un exemple criant avec Albert Rösti, venu de Swiss Oil, et présentement conseiller fédéral. Cela n’en fait pas le magistrat le plus lucide pour lutter contre l’effet de serre. Et, une fois son mandat achevé, il sera intéressant de voir où il ira pantoufler.
Notes