Alors que Donald Trump entre en fonction pour son second mandat présidentiel ce lundi 20 janvier avec, dans son sillage, son potentiel futur ministre de l’efficience gouvernementale, Elon Musk, patron de X, une déferlante de fermetures de comptes vient sanctionner un réseau considéré comme infréquentable.
Et comme Le Monde, le Guardian, le New York Times, Bastamag, Mediapart et de nombreuses ONG telles Amnesty International et Public Eye, Le Courrier quitte X. Pas besoin de revenir en long et en large sur les contenus problématiques de la plateforme, qui vont des discours haineux aux fake news en série. Strapontin pour l’extrême droite et les antiféministes, le réseau social X est devenu nauséabond.
Si certains choisissent de rester sur X pour y faire résonner une voix humaniste, de gauche ou écologiste, comme l’avait décidé le média indépendant Reporterre avant de rejoindre lui aussi le mouvement #HelloQuitteX, notre journal n’y croit plus et refuse de le cautionner par sa présence, voire de financer ce genre de contenus. Le journalisme n’a plus rien à gagner sur une plateforme qui ne donne plus de place à un débat public sain et équilibré.
Bon débarras? On pourrait le penser, d’autant plus que l’algorithme de X invisibilise depuis plusieurs mois les contenus publiés par les médias dits traditionnels, comme Le Courrier, qui effectuent un travail d’enquête et de vérification des informations. Mais l’algorithme de Meta fait de même depuis plusieurs années! Et quid de l’annonce inquiétante lancée par son propriétaire, Mark Zuckerberg, de mettre un terme à la vérification des informations (fact-checking) aux Etats-Unis?
Alors, faut-il aussi laisser tomber Facebook et Instagram? La question s’est posée. Le Courrier a décidé d’y rester pour le moment, afin de préserver des contacts précieux et l’accès à certaines informations; Instagram constitue par exemple un canal important pour savoir ce qui se passe à Gaza. Une grande partie des actions militantes se diffusent également par ce réseau. Mais il faudra faire preuve de vigilance, s’en tenir à notre éthique et définir les limites de ce qui est acceptable.
Quitter X, donc. Mais pour aller où? Comme de nombreux médias, Le Courrier a rejoint Bluesky, un réseau développé il y a cinq ans sur mandat de Twitter, devenu indépendant en 2021. Etiquetée comme bienveillante et libre de toute haine ou violence, cette plateforme en croissance exponentielle depuis l’élection de Donald Trump peine néanmoins à proposer une modération plus efficace que celle des rejetons d’Elon Musk et de Mark Zuckerberg. Que va-t-il se passer quand tout le monde, y compris l’extrême droite, s’y retrouvera?
«On aimerait pouvoir s’en passer, mais on n’y arrive pas, c’est un peu comme avoir une relation avec un pervers narcissique», relevait l’autre jour un collègue. Comment lui donner tort? Les réseaux sociaux sont nos caissettes à journaux en cette ère digitale. Ils permettent de faire savoir à nos communautés que nous avons publié un article susceptible de les intéresser. Et si la plupart des gens «aiment» ou commentent nos publications sans lire les articles qu’y sont liés, il reste difficile de se priver de cette occasion de faire connaître notre travail journalistique, nos opinions et nos valeurs.