Édito

Le droit face à l’impunité

Le droit face à  l’impunité
Le site d'une frappe aérienne israélienne qui a ciblé des villages du sud du Liban le 25 septembre 2024. KEYSTONE
Guerre

Le chef d’état-major de l’armée israélienne a demandé mercredi à des soldats de se préparer à une possible «entrée» au Liban, où l’armée multiple les attaques après les tirs de roquettes du Hezbollah. Une annonce qui fait suite à l’assassinat de quelque 70 personnes (et 3000 blessé·es) à l’aide de bipeurs piégés, suivi d’une réplique portant sur des talkies-walkies. Et enfin, des bombardements massifs lundi faisant quelque 500 morts.

Les méthodes utilisées sont clairement constitutives de crimes de guerre. Dans la propagande d’Etat, toutes les victimes étaient des terroristes. Mais ces bipeurs avaient circulé, y compris au sein du personnel médical1>Doha Chams, «Attaque israélienne au Liban: ‘Un tremblement de terre sous mes pieds’», Orient XXI, 25 septembre 2024., de nombreux civil·es à proximité des bipeurs ont été touchés et on compte deux enfants parmi les morts.
Le tout dans une impunité totale.

En l’occurrence, le droit international «interdit» pourtant l’utilisation d’appareils «piégés» ayant l’apparence d’objets «inoffensifs», a rappelé Volker Türk, le Haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.

Mais, curieusement, ces méthodes relevant du terrorisme d’Etat n’ont suscité que peu de critiques dans les pays occidentaux. C’est même plutôt la performance qui a été saluée, «digne de James Bond», a-t-on pu entendre sur une chaîne bollorisée.

Le regretté Cabu, dessinateur de Charlie Hebdo et du Canard enchaîné, tué dans les attentats de 2015, avait une formule pour rappeler à l’ordre celles et ceux qui, face à un armement haut de gamme, demandent «comment ça marche?» alors que la vraie question est «à quoi cela sert?»

Les bombardements subséquents du Liban qui ont causé plus de 500 morts ne suscitent pas non plus de réactions à la hauteur des crimes de guerre commis. C’est qu’Israël dispose d’un veto par procuration, les Etats-Unis bloquant au Conseil de sécurité de l’ONU toute tentative de mettre fin à ces agissements, qui menacent pourtant la paix dans toute la région. Les pays européens ont eux décidé de n’opposer aucune forme de résistance à ce déferlement de violence. Ne serait-ce qu’en décrétant un embargo sur les armes.

En attendant, c’est l’idée même du droit – pourtant seule capable de tracer un chemin permettant d’espérer conduire un jour à la paix – qui est jour après jour vidée de son sens. Ce genre d’abdication est porteuse d’horreurs. Présentes et à venir.

Opinions Édito Philippe Bach Guerre

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