Les artistes suisses persistent et signent
Le 26 octobre dernier, nous étions plus de 1000 artistes, actrices et acteurs du monde culturel suisse, à appeler notre gouvernement à exiger un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel à Gaza. Nous demandions également que la Suisse cesse toute coopération militaire avec Israël et surtout qu’elle défende, par tous les moyens possibles, les Conventions de Genève, cruellement mises à mal dans cette partie du monde.
Le 12 février, nous lancions un deuxième appel, signé cette fois par 1500 artistes, dans lequel nous demandions aux autorités suisses: d’exiger, comme l’ordonne la Cour internationale de justice, que «l’Etat d’Israël suspende immédiatement ses opérations militaires à et contre Gaza afin de faciliter l’acheminement d’une aide humanitaire suffisante jusqu’aux lieux où elle est nécessaire; de suivre l’exemple de la Belgique, de l’Espagne, de l’Irlande, de la Norvège et d’autres pays qui ont annoncé qu’ils continueront à financer l’UNRWA, l’agence de l’ONU opérant dans la région; d’exiger, avec la plus grande fermeté, le respect des Conventions de Genève et de tout mettre en œuvre pour que débutent immédiatement des négociations en vue d’une solution politique du conflit, seule issue pour une paix juste et durable dans la région.
Six mois plus tard, que constatons-nous?
1) Le gouvernement suisse n’a pas engagé la moindre tentative pour rappeler à Israël l’obligation d’appliquer ces Conventions de Genève dont la Suisse est pourtant dépositaire et Israël signataire. Ces conventions stipulent notamment que «les belligérants sont tenus d’accorder une protection particulière aux malades, aux blessés et aux naufragés ainsi qu’au personnel médical, aux ambulances et aux hôpitaux» ou que «les civils qui se trouvent aux mains de l’ennemi dans leur propre pays ou en territoire occupé» doivent être protégés. Le devoir de la Suisse est de rappeler aux Etats qui l’enfreignent l’obligation de respecter le droit international humanitaire.
2) Le gouvernement suisse saborde la seule institution d’envergure en mesure de soulager les souffrances de la population civile assiégée, l’UNRWA. Au plus fort des massacres, notre gouvernement a suspendu son financement de l’agence, suite aux allégations de l’Etat d’Israël. Une fois ces accusations démenties par un rapport indépendant, et alors que tous les Etats versaient à nouveau leur contribution, la Suisse était le seul pays, avec les Etats-Unis, à refuser de reprendre la totalité de son versement. Le summum de l’abjection a été atteint le 9 septembre 2024, lors de la séance plénière du Conseil national, qui a décidé, sur motion de l’UDC, de suspendre à nouveau et dans sa totalité le soutien de la Suisse à l’UNRWA. Ce qui se traduira très concrètement sur le terrain par des souffrances et des morts supplémentaires de civil·es.
3) Le gouvernement suisse coopère avec Israël sur tous les plans – militaire, économique, scientifique, politique ou culturel – et n’adresse aucune réprimande aux entreprises suisses qui contribuent à l’effort de guerre israélien via des échanges commerciaux, alors même qu’Israël mène quotidiennement de violentes incursions contre les habitant·es de Cisjordanie et que les bombardements y sont devenus monnaie courante.
Nous, artistes suisses ou résidant en Suisse, exprimons notre honte, notre indignation et notre colère.
Nous demandons au gouvernement suisse: de rétablir sans délai la participation financière de la Suisse à l’UNRWA; de cesser toute coopération avec l’Etat d’Israël; de tout mettre en œuvre pour empêcher les exactions de l’Etat d’Israël; d’exiger d’Israël l’application stricte des Conventions de Genève.
Les responsables politiques suisses doivent immédiatement cesser de faire de notre pays et de ses habitants les complices d’un génocide.
* Le collectif des artistes pour un cessez-le-feu à Gaza, appeldesartistes.ch