Répondre à une demande grandissante

Selon les estimations, 2,5 millions de personnes utilisent chaque jour les moyens du réseau découlant du «transport régional voyageurs» (TRV) pour se rendre au travail, pour les loisirs ou les tâches quotidiennes. Le TRV assure une desserte par les transports publics dans toute la Suisse. Il s’agit donc d’un élément clé du service public qui contribue de façon incontournable au bon fonctionnement de la mobilité en Suisse. Il complète le trafic grandes lignes pour optimiser la chaîne de voyage dans notre pays.

Or, il semble assez clair que le TRV ne peut pas être exploité de manière rentable. La plupart des lignes dans le trafic régional ne parviennent pas à couvrir leurs propres coûts avec la vente de billets. Selon les chiffres de l’Office fédéral des transports (OFT), le taux de couverture des coûts se situait en 2019 à peine au-dessus de 50%. Afin de proposer néanmoins une offre de transports publics régionaux pour les voyageurs (TRV), la Confédération et les cantons commandent des prestations de transport aux entreprises de transport et chacun supporte la moitié des coûts non couverts par les entreprises. Les indemnités versées par la Confédération et les cantons se montent à environ 2 milliards de francs par année. Ceci permettait, en 2018, de garantir une desserte de base d’environ 1500 lignes de TRV.

Au cours des procédures de commande, la Confédération, les cantons et les entreprises de transport déterminent quelles lignes doivent être proposées, selon quel horaire, et quels coûts doivent être pris en charge par les pouvoirs publics.

Une augmentation constante. Etant donné que la population et la mobilité sont en constante croissance en Suisse, le besoin en prestations de transport s’accroît également. C’est pourquoi les prévisions concernant l’utilisation du TRV ont toujours une tendance à la hausse. Pour 2022, on prévoyait en Suisse que quelque 9 milliards de voyageurs-kilomètres (v-km) seraient parcourus dans le TRV. En 2022 uniquement, à cause du Covid, on s’attendait à un recul dans l’utilisation du TRV. En revanche, en 2023 on estimait que le niveau de 2020 serait de nouveau atteint, et il l’a été cette année. Donc, afin de pouvoir répondre à la demande grandissante en matière de prestations de transport, il faut que les prestations commandées augmentent. Entre 2008 et 2022, les prestations commandées en kilomètres ont augmenté chaque année de 2,8%.

Pénurie de personnel. Aujourd’hui déjà, de nombreuses entreprises de transport sont confrontées à un manque de personnel. C’est le cas des deux entreprises de transports publics de Zurich et Bâle (VBL et VBZ), mais aussi des chemins de fer rhétiques (RhB) ou du TransN (canton de Neuchâtel), pour n’en citer que quelques-unes. Le corollaire, ce sont des tours de service et des lignes supprimés, c’est-à-dire des prestations moins bonnes pour les usagères·ers et une pression accrue sur les travailleuse·eurs de la branche.

Cette problématique va encore s’accentuer dans les années à venir en raison des départs à la retraite (40% des salarié·e·s aux CFF dans les quinze prochaines années). Il est donc indispensable de rendre les conditions de travail dans les transports publics attrayantes et modernes afin de garantir un modèle à succès.

Les responsables politiques doivent comprendre qu’il ne suffit pas de développer l’infrastructure ou d’acheter du nouveau matériel roulant. Sans personnel motivé et qualifié, il ne sera pas possible de mettre en place un système de transport plus économe en énergies fossiles. Les services publics de transport jouent une partition centrale dans la lutte contre le changement climatique. Pour cela, il faut des salaires décents, un personnel suffisant et des conditions de travail saines. C’est aux pouvoirs publics de mettre à disposition les moyens financiers nécessaires à cette fin. Ni des augmentations irréalistes de l’efficacité, ni le fait de s’accrocher au dogme du marché ne permettront de remédier à cette situation. En fin de compte, la politique doit être prête à investir dans le personnel.

Or, justement, le syndicat SEV, aux côtés du SSP et de Syndicom, expriment par ailleurs des préoccupations concernant la pression exercée sur les cantons et communes, soumis à des programmes d’austérité, notamment les cantons qui ont moins de capacité financière. Cela sera une de nos grandes batailles de l’automne.

Valérie Boillat est vice-présidente du SEV

Valérie Boillat

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