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Une mission (de non)-enquête en Syrie

Désireux de renforcer leurs politiques antimigratoires, les gouvernements occidentaux multiplient les règles de gestion des flux. Au rang desquelles la création de «zones de sécurité» dans les pays d’origine, comme c’est actuellement l’idée en Syrie. Une idée qui persiste malgré «des résultats désastreux en matière de protection des civils», selon Andrew Stroehlein, de l’ONG Human Rights Watch.
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Des fonctionnaires tchèques seraient en train de préparer une mission d’enquête en Syrie. Leur objectif est d’y créer une «zone de sécurité», afin que les pays de l’Union européenne (UE) puissent y renvoyer les réfugié·es syrien·nes.

Permettez-moi de leur faire économiser le coût de leurs vols et l’impact de leur empreinte carbone en leur donnant les faits que Human Rights Watch et toutes les autres organisations sérieuses de défense des droits humains ont déjà constatés: il n’y a pas de zone de sécurité en Syrie où les réfugié·es pourraient retourner. La tentative d’imaginer ou d’établir de telles «zones de sécurité» en Syrie ne date pas d’hier. C’est la politique du «faisons semblant», imaginée encore et encore, dès les premières années de la guerre civile syrienne. Les pays confrontés à la perspective d’accueillir des réfugié·es syrien·nes ont voulu croire qu’il existait des régions de Syrie où ils les pouvaient renvoyer, même si c’est manifestement faux. La Turquie a tenté de créer une «zone de sécurité» dans le nord du pays. C’est là l’un des endroits les plus dangereux de Syrie.

Les gouvernements ne tiennent pas compte non plus de l’historique des «zones de sécurité» dans les conflits en général. Les résultats obtenus en matière de protection des civils y sont désastreux. Srebrenica, en Bosnie-Herzégovine, n’est qu’un exemple parmi d’autres. Malgré tout, les gouvernements continuent de défendre cette idée. La mission d’enquête tchèque pourrait également impliquer Chypre, un autre Etat membre de l’UE favorable à l’idée d’une «zone de sécurité» en Syrie. De toute évidence, le gouvernement chypriote ne se préoccupe guère de la sécurité des réfugié·es syrien·nes. Il repousse déjà les bateaux de réfugié·es vers le Liban, où les forces de sécurité ont pris l’habitude de refouler les Syrien·nes vers leur pays d’origine.

Il n’y a pas besoin d’une mission d’enquête pour se souvenir qu’il s’agit du même gouvernement syrien du président Bachar el-Assad qui a causé plus d’un demi-million de morts et déplacé de force 12 millions de personnes depuis le début de la guerre en 2011. C’est ce même gouvernement qui continue d’être responsable de tortures généralisées et systématiques.

Les gouvernements de l’UE soutiennent-ils l’idée de «zones de sécurité» en Syrie déjà testées et non concluantes parce qu’ils sont insensés, volontairement ignorants ou arrogants? Une combinaison de tout ça? Ou bien les agent·es des autorités publiques se sentent-ils sous la pression de ces hommes et femmes politiques xénophobes qui ont promis à l’opinion que punir les réfugié·es rendrait la vie meilleure d’une manière ou d’une autre, et doivent maintenant leur infliger une sorte de punition? Quoi qu’il en soit, ils et elles vivent dans un autre univers.

Je sais que les faits peuvent être profondément impopulaires dans certains segments de la politique européenne ces jours-ci, mais je vais quand même vous les rappeler: il n’y a aucun endroit en Syrie qui soit sûr pour le retour des réfugié·es.

Andrew Stroehlein est directeur des relations médias de Human Rights Watch en Europe, www.hrw.org/fr

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