Pour un peu, on crierait «Vive la France!» Sans aucun lien avec le foot. C’est bien la République française qui a été sauvée dimanche soir par la victoire du Nouveau Front Populaire (NFP) dans un dénouement sous haute tension. Sauvée du déshonneur et des sombres perspectives qui se dessinaient en cas de succès de l’extrême droite.
Premier constat et premier motif de soulagement: Jordan Bardella ne sera pas premier ministre. Le Rassemblement national (RN) se voyait en haut de l’affiche, il est relégué au troisième rang des blocs représentés à l’Assemblée nationale. Deuxième constat: le pari de la gauche a été gagné. Contre toute attente et dans l’urgence imposée par la dissolution surprise d’Emmanuel Macron. Et en dépit de querelles internes et de divergences à peine masquées par l’enjeu. Troisième constat, enfin: une participation massive, qui témoigne d’un sursaut démocratique salutaire. Un refus de la fatalité autoritaire et néolibérale.
Le barrage a fonctionné, in extremis. Et maintenant? En l’état, sans majorité absolue, le pays semble ingouvernable. Chacun joue sa carte. Jean-Luc Mélenchon en s’exprimant le premier, les estimations à peine connues, sans doute pour insister sur le rôle qu’il entend continuer à jouer à gauche. Son alliée verte, Marine Tondelier, révélation de la campagne, en appelant à rester unis autour du «programme de rupture» du NFP. Jordan Bardella en mettant en garde contre le fait d’ignorer la voix des millions d’électeur·rices du RN. Et le président en restant silencieux, faisant mine de prendre acte d’un vote complexe avant d’agir – lui qui se targuait d’avoir dégoupillé une grenade dans les jambes de ses adversaires en dissolvant le parlement. Son fusible Gabriel Attal a pris ses responsabilités en présentant sans tarder sa démission.
Fossoyeur et incendiaire de la République, Emmanuel Macron gagne un sursis en sauvant du naufrage sa «minorité présidentielle», qui finit deuxième devant le RN. Le vote de dimanche traduit une immense attente vis-à-vis de la gauche. Son unité pourrait très vite éclater si une partie de cette coalition, menée par les socialistes, décidait de s’allier avec les macronistes pour gouverner en reniant l’essentiel de son programme social et économique. Une telle trahison ouvrirait un boulevard au RN à la présidentielle de 2027, voire avant, lors de législatives qui suivraient automatiquement toute nouvelle dissolution.
Au Nouveau Front Populaire d’être à la hauteur de ce moment historique en demeurant ferme sur ses principes.