Suisse

Greenpeace tacle Coop et Migros

En matière de protection de la planète, les deux géants de la distribution ont encore du chemin à parcourir.
Greenpeace tâcle Coop et Migros 1
La grande majorité des Suisses désire consommer de la viande au moins de manière occasionnelle. KEYSTONE
Commerce de détail

Coop affirme s’engager pour la durabilité. Migros, elle, se vante de mettre l’accent sur des produits respectueux de l’environnement. La réalité est plus nuancée. Environ 30% de l’empreinte carbone de la Suisse passe par ces deux entreprises, selon une enquête de Greenpeace publiée ce mercredi. Migros a généré 15,3 millions de tonnes d’équivalent CO2 en 2023. Son concurrent affiche, lui, pour l’année 2022, un total d’émissions de 30,3 millions de tonnes d’équivalent CO2.

Coop, qui ne commente pas ces chiffres, renvoie à son rapport climatique de 2023. En page 56, le texte fait état d’émissions à hauteur de 22 millions de tonnes d’équivalent CO2 pour l’année dernière. Cette donnée prend en considération uniquement les émissions indirectes du groupe. Plus de 98% des émissions ne sont pas générées par l’enseigne elle-même mais par ses partenaires en amont et en aval de ses chaînes de valeur.

Migros ne fait pas davantage de commentaires. «Depuis 2019, l’enseigne a déjà réduit ses émissions d’environ 60% en valeur absolue», précise-t-elle.

Tant pour elle que pour son rival, les aliments d’origine animale représentent plus de 40% des émissions, selon Greenpeace. «Les deux distributeurs détiennent environ 80% du commerce alimentaire et exploitent les plus grandes firmes de transformation de viande en Suisse, Bell et Micarna», souligne Barbara Wegmann, experte en consommation auprès de l’ONG.

Publicité omniprésente

Les deux géants orange sont aussi les plus gros investisseurs publicitaires du pays. Ils ont donc une influence particulièrement importante sur la consommation, aux yeux de l’experte. D’après Greenpeace, Coop dépense environ six fois plus d’argent en publicité pour des aliments d’origine animale que pour des produits de substitution véganes. Migros environ trois fois plus.

«Coop et Migros continuent de stimuler la consommation d’aliments d’origine animale»
Barbara Wegmann

L’organisation a donc demandé aux deux détaillants d’arrêter de faire de la publicité pour les produits carnés. «Les deux entreprises n’ont malheureusement pas pris de mesures et continuent de stimuler la consommation d’aliments d’origine animale avec une campagne de publicité omniprésente pour les grillades et des surenchères de rabais sur la viande et le poisson», déplore Barbara Wegmann.

Vendre moins de viande

Selon l’ONG, si ces deux groupes veulent respecter leurs objectifs de réduire leurs émissions à zéro net d’ici à 2050, la seule solution est de réduire leur vente d’aliments d’origine animale. En moyenne, les produits d’origine végétale émettent 10 à 50 fois moins de gaz à effet de serre que les aliments d’origine animale.

N’est-ce pas le consommateur qui est responsable de cette empreinte carbone via ses emplettes? «La réduction des émissions dépend des efforts de tous les acteurs, y compris des consommateurs. Le commerce de détail a cependant une responsabilité particulière. Il peut influencer de manière déterminante le comportement d’achat avec l’assortiment qu’il propose, les prix, le placement des produits et la publicité», répond l’experte. Et de regretter «les rabais agressifs» pratiqués par les deux enseignes.

Migros déclare ne pas vouloir moraliser sa clientèle et lui laisser la liberté de choix. La grande majorité des Suisses désire consommer de la viande au moins occasionnellement. La demande de poulet est par exemple en hausse. «C’est pourquoi les mesures de communication sont importantes, sans quoi nous perdrions des clients qui couvriraient leurs besoins, du moins en partie, avec des produits étrangers, où le bien-être des animaux n’est souvent pas aussi important que chez nous», indique une porte-parole du géant orange.

Pays-Bas en avance

Il est possible de faire mieux, soutient Greenpeace, qui cite en exemple la chaîne de supermarchés néerlandaise, Jumbo. Ce détaillant a décidé de ne plus promouvoir la viande dès la fin mai 2024. Et il projette que 50% des protéines vendues dans ses magasins soient d’origine végétale d’ici à 2025.

Coop et Migros veulent aussi augmenter leur part d’aliments respectueux de l’environnement. «Avec 21 500 produits, nous disposons déjà du plus grand assortiment durable du commerce de détail suisse, et nous ne cessons de l’élargir. Via notre vaste offre végétalienne et végétarienne, nous tenons en outre compte de l’évolution vers une alimentation à base de plantes», fait savoir un porte-parole de Coop. D’ici fin 2025, Migros compte augmenter à 35% le chiffre d’affaires réalisé avec des produits durables dans ses supermarchés, ses hypermarchés et en ligne.

Au niveau agricole, son concurrent soutient par exemple, depuis des années, le développement de la production de proximité de soja en Europe. «Nous travaillons également à un essai visant à réduire les émissions de méthane dues aux additifs alimentaires dans la production de viande de bœuf», conclut le porte-parole. LA LIBERTÉ

Suisse Maude Bonvin Commerce de détail

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