On nous écrit

Israël-Palestine: et l’humain dans tout ça?

Le collectif «Israël-Palestine: et l’humain dans tout ça?» condamne tout appel à la délégitimation de l’existence d’Israël.
Proche-Orient

Depuis le 7 octobre 2023, le conflit au Proche-Orient est entré dans chaque recoin de nos vies: nos couples, nos familles, nos amis, nos collègues, la rue et les réseaux sociaux. Il y a eu les silences et les justifications du silence puis la parole s’est libérée, omniprésente et décomplexée. Désormais, nous nous sentons sommés de choisir: la semaine dernière, il fallait avoir nos yeux sur Rafah ou sur les otages à Rafah, l’un excluant la possibilité de l’autre.

Un nouvel ordre moral semble né et nous avons peur, car nous pressentons qu’il faut un bouc émissaire, et que nous, membres de la diaspora juive, serons désignés d’office. Certains dissimulent leur kippas, leur mezouzah, parfois même leur patronyme. Les universités publient des listes de noms, que vont-ils en faire, quelle sera la prochaine étape? Les fantômes du passé de nos aînés se réveillent et eux aussi pleurent. L’antisémitisme resurgit, paré de nouveaux habits. Comment a-t-on pu en arriver là?

Ici, confortablement installés dans nos canapés, nous sommes hantés par les images sordides, habités par la haine, nous sommes forcés à comparer en nombre, d’un côté les femmes et les fillettes démembrées, ensanglantées, violées, les gamins, les grands-pères, les bébés kidnappés… et de l’autre, les corps sans vie d’hommes, de femmes et d’enfants, encerclés, pris au piège et bombardés par milliers. D’un côté, les pogroms, de l’autre les massacres, puis, ensemble, la sidération, l’arbitraire, le martial, la terreur qui noircit le cerveau. Tout est biaisé, on ne voit plus clair, les émotions s’entrechoquent, les rouges-bruns s’immiscent, la vague verte (islamiste) en prime. On tente de nous embarquer dans cette folie à force de slogans, d’injonctions à décliner notre camp, notre identité. Chaque jour supplémentaire de guerre nous incite à nous ranger derrière une bannière, à nous éloigner de l’Humain et donc d’une perspective de paix car le combat s’autoalimente dans les extrêmes.

Face à la résurgence des idéologies extrémistes non seulement au Proche-Orient mais aussi en Europe, nous sommes inquiets car nos valeurs humanistes sont mises à mal. Tout un chacun peut être juge et partie, spécialiste du droit international humanitaire, tranchant sans nuances. Nous rappelons que ni le Hamas, mouvement islamiste terroriste, ni le gouvernement israélien d’extrême-droite, qui commet des actions militaires meurtrières en masse sur la population de Gaza, ne cherchent aujourd’hui une paix durable. Mais chaque personne a en elle un potentiel de violence ou de paix qu’il lui appartient de cultiver. Nous souhaitons aux personnes gazaouies et israéliennes de vivre en sécurité plutôt que dans la haine et sommes convaincus que cette sécurité sera garantie quand ces deux peuples pourront pleinement jouir d’un droit légitime à l’autodétermination, qui ne sera pas instrumentalisé par d’autres puissances, et quand ils arriveront à se défaire de leurs gouvernements actuels dominés par des partis intégristes religieux.

Nous condamnons tout appel à la délégitimation de l’existence d’Israël qui, dans le contexte actuel, est un appel à enlever à une population entière son droit à l’autodétermination. Nous appelons nos gouvernements à reconnaître au plus vite un Etat de Palestine indépendant. Nous ne cesserons pas non plus de défendre un cessez-le-feu, la libération de toutes les personnes otages à Gaza. Enfin, nous nous opposons avec force à toute colonisation illégale et à toute violence dans les territoires palestiniens définis comme tels par le droit international.

Nous formons un collectif nommé «Israël-Palestine: et l’humain dans tout ça?» qui, aujourd’hui, refuse cette prise à partie constante car la protection fondamentale de la personne humaine et de sa dignité, en temps de paix comme en temps de guerre, n’a pas de couleur ni politique ni nationale ni religieuse.

Signataires: Collectif IPH, Bénédicte Amsellem Ossipow, Dania Appel, Michel Borzykowski, Monique Eckmann, Janine de Founes, Luc Heimendinger, Daniel Fradkoff, Massia Kaneman-Pougatch, Leo Kaneman, François Lederrey, Yves Magat, Sarah Pagin, Barbara Vogt-Hornick.

Précision du Courrier: Nous publions ce texte dans un souci d’alimenter un débat pouvant mener au dialogue. Certains éléments évoqués dans cette lettre, comme les femmes et les fillettes démembrées, n’ont toutefois pas été corroborés par des sources indépendantes. A garder à l’esprit en ces temps de guerre propices aux désinformations en tout genre.

Opinions On nous écrit Halima Delimi Sophie Savoie Proche-Orient

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