Édito

Débats politiques muselés

Débats politiques muselés
Protestation d'étudiant·es propalestinien·nes à l'université de Columbia, ce lundi 29 avril à New York. KEYSTONE
États-Unis

Une constante criminalisation de la solidarité avec les Gazaoui·es en particulier et les Palestinien·nes en général. Aux Etats-Unis, dans plusieurs universités, un mouvement social d’ampleur est né. Après d’importantes manifestations, il se cristallise avec des occupations de campus. Notamment celui de l’université de Columbia à New York.

L’autorisation donnée par la direction de cet établissement à la police d’évacuer ces militant·es a suscité un malaise. Elle renvoie à des événements tragiques durant la guerre du Vietnam. Notamment au massacre, en 1970, à l’université de Kent State, en Ohio, lorsque la garde nationale ouvrit le feu sur des étudiant·es manifestant pacifiquement, avec quatre mort·es et neuf blessé·es. Cela devrait inciter à davantage de retenue.

D’autant plus qu’il y a panique à bord du vaisseau démocrate, qui n’avait pas anticipé ce mouvement social issu de ce qui devrait être sa base. Deux récentes actions politiques lors des primaires démocrates ont mis en évidence qu’une partie non négligeable de cet électorat ne se reconnaît pas dans les positions pro-israéliennes jusqu’à la caricature de l’administration Biden et voit au contraire dans cette posture un obstacle à la paix.

L’expression de cette divergence a été rendue visible via un vote blanc organisé dans le processus de désignation du candidat démocrate. Il a abouti à des taux de 13,2% au Michigan et de 8,3% au Wisconsin. Ce dernier Etat a notamment coûté sa victoire à Hillary Clinton contre Donald Trump en 2016…

La dérive est la même dans d’autres pays. En France, que penser des mesures liberticides contre des militant·es politiques, syndicaux et associatifs convoqué·es par la police pour des motifs souvent futiles? Ou des conférences et des manifestations interdites sous prétexte que des slogans antisémites pourraient y être lancés. Cela va jusqu’à biaiser la campagne électorale pour les élections européennes, lorsque des candidates comme la militante propalestinienne Rima Hassan sont muselées. Et que penser de l’incroyable interdiction d’entrer en Allemagne prononcée à l’encontre de l’ancien ministre des Finances grec Yanis Varoufakis sous le même prétexte?

Au-delà d’une nécessaire solidarité avec la population de Gaza, ce sont aussi nos libertés et plus largement le bon fonctionnement de la démocratie qui sont malmenés sous nos yeux. Cette dérive autocratique doit nous inquiéter. Elle est la traduction du refus du droit dans cette région du Proche-Orient. Et elle ouvre chez nous la voie à des comportements autoritaires qui nous concernent très directement toutes et tous.

Opinions Édito Philippe Bach États-Unis

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