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Où les mesures Covid persistent

Les restrictions liées à la pandémie de Covid-19, toujours présentes en Corée du Nord, couplées aux sanctions onusiennes ont «gravement compromis la sécurité alimentaire» du pays, relève Andrew Stroehlein, de l’ONG Human Rights Watch. Avec pour conséquence d’aggraver encore la situation humanitaire et les droits humains déjà maltraités par le régime totalitaire.
Corée du Nord

Pour la plupart des pays du monde, les restrictions mises en place lors de la pandémie de Covid-19 ne sont plus qu’un lointain souvenir. En Corée du Nord, les principales restrictions liées à la pandémie sont toujours en place et rendent la vie des gens encore plus misérable dans l’enfer de la prétendue «République populaire démocratique».

Il s’agit plus précisément de restrictions en matière de circulation et de commerce. En 2020, alors que la pandémie mondiale faisait rage, le gouvernement nord-coréen a fermé sa frontière avec sa voisine, la Chine. Il a imposé des quarantaines excessives et inutiles ainsi que de nouvelles restrictions aux activités économiques et à la liberté de circulation.

Ces mesures ont gravement compromis la sécurité alimentaire du pays. Auparavant, de nombreux produits dont les Nord-Coréen·nes avaient besoin pour survivre entraient dans le pays en provenance de Chine par des voies commerciales formelles et informelles. Les restrictions liées au Covid ont aggravé une situation humanitaire et des droits humains déjà mauvaise dans le pays.

Les sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies de 2016 et 2017, qui ont limité la plupart des exportations et certaines importations, ajoutent aux difficultés. L’objectif de ces sanctions était sans doute de pousser le gouvernement nord-coréen à modérer certaines de ses actions géopolitiques les plus folles. Cependant, les sanctions ont eu pour effet involontaire de nuire aux Nord-Coréen·nes ordinaires. Leur impact économique a compromis la capacité des gens à gagner leur vie et à ­accéder à la nourriture et aux biens ­essentiels.

En un sens, les gens sont pris entre le marteau d’un gouvernement extrêmement abusif et l’enclume d’une communauté internationale qui est tellement frustrée par le régime totalitaire de Pyongyang qu’elle tente des politiques ayant des conséquences involontaires pour les Nord-Coréen·nes ordinaires qui souffrent déjà depuis longtemps. Si le Conseil de sécurité des Nations unies devrait certainement revoir les sanctions actuelles contre la Corée du Nord et leur impact, soyons clairs: le principal problème est le gouvernement, l’un des plus répressifs au monde. Même avant la mise en place des restrictions liées au Covid-19, la Corée du Nord était l’un des pays les plus autoritaires et isolés au monde.

En fin de compte, pour atténuer les difficultés auxquelles sont confronté·es les Nord-Coréen·nes ordinaires, il faudrait que le dictateur nord-coréen Kim Jong Un fasse un sérieux revirement de politique: il faudrait rouvrir les frontières au commerce, assouplir les restrictions sur les déplacements internes et autoriser une aide internationale d’urgence contrôlée. En bref, il devrait mettre fin à toutes ces «politiques qui ont essentiellement fait de la Corée du Nord une prison géante».

La levée des restrictions liées à la pandémie serait déjà un bon début. Nous sommes en 2024, après tout, il est grand temps de le faire.

Andrew Stroehlein est directeur des relations médias en Europe, Human Rights Watch.

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