Édito

Paysannerie multiple

Paysannerie multiple
En France, où le débat s’est enflammé, l’omniprésence médiatique de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, syndicat majoritaire du monde paysan, étale un discours qui fait la part belle au système économique en place. KEYSTONE
Agriculture

A la crise paysanne, Berne répond pour l’heure par un assouplissement des procédures d’homologation des produits phytosanitaires, usant d’un réflexe de repli sur une solution de facilité court-termiste. L’usage accru de pesticides n’est qu’un pis-aller dont les conséquences sanitaires et environnementales ont été prouvées. Le clamer haut et fort n’est pas une attaque contre le monde paysan, dont les insatisfactions, en termes de conditions de travail et de revenus, sont nombreuses et légitimes.

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Mais ce mécontentement est trop souvent résumé par une opposition entre mesures écologiques et pérennité du système agricole. Rendant inaudible des voix qui se battent pour dire qu’un système durable, tant pour les travailleur·euses que pour les écosystèmes, est possible. En Suisse, le syndicat Uniterre alarme régulièrement sur les intérêts néolibéraux qui guident la faîtière paysanne nationale. Rappelant au passage que les géants du marché des semences (Syngenta, Corteva et Bayer) sont les mêmes qui arrosent les marchés de pesticides. Un combo qui ne sert ni l’indépendance paysanne ni la stabilité des écosystèmes, à l’heure où les agriculteurs et agricultrices voient leurs coûts exploser et leurs revenus s’effondrer.

En France, où le débat s’est enflammé, l’omniprésence médiatique de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), majoritaire dans le monde paysan, propage un discours faisant la part belle au système économique en place. Il existe pourtant des voix progressistes. La Confédération paysanne, tout en s’opposant au libre-échange, s’inscrit en faux dans le débat contre l’écologie. Elle porte au contraire la revendication d’un accompagnement fort des paysan·nes qui s’engagent dans la transition agroécologique. Ces voix des petit·es sont les mêmes qui s’expriment contre les logiques d’appropriation de l’eau dans les bassines ou des terres par les spéculateurs. Il s’agit urgemment de soutenir le combat paysan, mais refusons d’encenser le discours d’un système agro-industriel qui nous enfume.

Opinions Édito Maude Jaquet Agriculture

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