A l’école des inégalités
Le dernier classement PISA, qui compare tous les trois ans les performances des élèves de 15 ans dans les pays de l’OCDE, montre que la Suisse s’en sort mieux que la moyenne. L’étude internationale parue mardi évalue les compétences en lecture, mathématiques et sciences naturelles.
Cet état des lieux reste assez restreint mais certains éléments sont révélateurs. Si la Suisse s’en sort plutôt bien, c’est surtout grâce à des élèves locomotives. Car la différence de niveaux entre enfants est énorme. Un·e élève sur cinq n’atteint pas les exigences de base en mathématiques. Au même âge, l’écart de niveau correspond à trois années scolaires! Et un·e élève sur quatre n’a pas de compétences suffisantes en lecture à 15 ans. C’est particulièrement inquiétant. Des lacunes dans ce domaine ont en effet un impact important dans toutes les sphères de la vie et empêchent la poursuite d’une formation de qualité. Ces écarts ne doivent rien au hasard. L’école reproduit les inégalités sociales, en Suisse plus qu’ailleurs. Les élèves issus des couches les moins favorisées se retrouvent dans les performances les plus faibles. Et selon l’étude de l’OCDE, cette tendance a été «plus importante que jamais» en 2022. Malgré les mesures prises, l’école échoue donc à garantir l’égalité des chances.
Dans beaucoup de cantons, les élèves sont réparti·es très tôt dans des cours différents en fonction de leur niveau. Si ce système est maintenu, c’est aussi pour répondre à la volonté politique de donner une place importante à la formation duale (apprentissage). Les élèves sont déjà trié·es à l’école, l’objectif étant de réserver l’école de maturité gymnasiale (collège) à celles et ceux qui vont poursuivre une formation universitaire ou en haute école. Ce système a ses avantages, mais ses effets pervers ne doivent pas être négligés.
Surtout que les employeurs sont de plus en plus frileux à engager des jeunes en apprentissage directement après l’école obligatoire… On les comprend, si l’école n’a pas réussi à leur faire acquérir des compétences de base suffisantes. Il est donc urgent de renforcer les apprentissages en ne laissant personne sur le carreau. L’école ne doit pas être un lieu de tri, mais un endroit où chacun·e peut développer ses potentialités, sa créativité et son esprit critique. Les cours à niveau mais aussi les devoirs à domicile – où les ressources des parents jouent un rôle parfois déterminant sur les apprentissages – doivent être repensés. Multiplier les réformes scolaires sans prendre en compte le rôle de l’école dans la reproduction des inégalités sociales ne servira à rien. L’institution scolaire a un rôle important à jouer dans la cohésion sociale, pour créer une société plus égalitaire.