«Plus de temps à perdre si nous voulons protéger des vies»
Plus de huit semaines déjà que les combats intenses ont éclaté dans les rues de Khartoum, puis se sont propagés dans le reste du pays. La violence des combats est telle que plus de 1000 personnes ont été tuées1>Selon les médias. et près de 1,6 million sont déplacées depuis le 15 avril2>Source: OCHA, accès: https://urlz.fr/mhUb. Certaines ont fui dans le pays, d’autres se sont dirigées vers des postes frontaliers vite débordés. Le conflit qui sévit actuellement3>Lire Maria Malagaris «Une guerre des généraux au Soudan», Le Courrier du 24 avril 2023 (article repris de Libération). entre l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide est un nouveau chapitre dans une crise qui affecte le pays depuis des décennies. Derrière ces combats se cache une réalité bien trop familière pour Médecins sans frontières (MSF): le non-respect de l’action médico-humanitaire, et des attaques contre les structures et le personnel de santé.
Les violences ont entraîné des pénuries de nourriture, d’eau, de médicaments et de carburant, provoquant une flambée des prix et entravant l’accès aux soins médicaux à un moment où les gens en ont le plus besoin. Selon les Nations Unies, la moitié de la population du Soudan, soit 25 millions de personnes, a maintenant besoin d’une aide humanitaire.
Pour MSF, les obstacles sont immenses. A Nyala, dans le sud du Darfour, nous avons été contraints de suspendre nos activités après qu’une maison et un entrepôt MSF ont été violemment pillés le 16 avril. A Khartoum, l’un de nos entrepôts médicaux a été pillé et les réfrigérateurs débranchés entraînant la péremption des médicaments. L’hôpital universitaire d’El Geneina, où MSF gérait les services de pédiatrie et de nutrition, a également été pillé et certaines parties ont été détruites. L’hôpital est toujours fermé aujourd’hui. Ce ne sont pas des incidents isolés. Ils s’inscrivent dans une tendance de mépris pour les personnes civiles et les établissements de santé par les deux parties belligérantes.
Ces incidents, de même que les défis administratifs pour notre personnel et logistiques pour l’acheminement des fournitures, compliquent nos interventions. Malgré ces difficultés, nos équipes restent déterminées à soutenir les communautés du Soudan en fournissant des soins de santé essentiels à ceux et celles qui en ont le plus besoin dans dix Etats. Nos équipes de MSF soignent les gens blessés par la guerre à Khartoum et au Darfour Nord. Elles fournissent aussi des soins de santé et améliorent l’accès à l’eau et les conditions d’hygiène pour les personnes réfugiées et déplacées, ainsi que les communautés d’accueil dans les Etats d’Al-Gedaref et d’Al-Jazeera. Nous faisons également don de fournitures médicales aux établissements de soins de santé dans tout le pays.
Notre expérience dans les zones de conflit nous permet toutefois d’estimer la magnitude du danger pour les personnes civiles et le personnel médical qui n’ont pas évacués. Il est impératif d’assurer la sécurité du personnel médical et des établissements de santé afin de garantir l’efficacité des soins. Pour ce faire, il faut permettre aux ambulances et aux individus cherchant une assistance médicale de circuler en toute sécurité et faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire vers les zones où les besoins sont les plus grands.
Au Soudan, l’espace humanitaire se rétrécit, alors que les besoins ne cessent d’augmenter. Cette situation pousse le système de santé au bord du précipice. Combien de vies qui auraient pu être épargnées sont désormais perdues? Près de deux mois après le début de ce conflit sanglant, les opérations humanitaires ont dû être interrompues dans de nombreuses régions du pays. MSF est l’une des rares organisations internationales d’assistance médicale et humanitaire qui continue de travailler au Soudan. Nous appelons d’urgence toutes les parties au conflit à garantir l’accès humanitaire et à permettre au personnel et aux fournitures essentielles d’atteindre les personnes piégées au cœur de ce conflit.
Notes