Genève

Rien ne change à l’Etoile, pour le pire

La fermeture du foyer pour RMNA de l’Etoile est encore repoussée. Les associations dénoncent l’inaction des autorités, qui s’étaient pourtant émues de la mort du jeune Alireza.
Rien ne change à l’Etoile, pour le pire
Le slogan «Alireza, on t’oublie pas» a à nouveau résonné mercredi dans les rues basses de Genève. JPDS
Asile

Pour la troisième fois en autant de mois, le slogan «Alireza, on t’oublie pas» a résonné mercredi dans les rues basses de Genève. Une centaine de manifestant·es ont défilé en fin de journée, de la place du Rhône aux Canons, pour rappeler au souvenir des autorités le destin tragique du jeune Afghan qui s’était donné la mort en décembre dernier après avoir reçu son avis d’expulsion vers la Grèce 1>Nos éditions du 5 et 6 décembre 2022..

A travers son histoire, c’est aussi la situation des autres réfugiés mineurs non-accompagnés (RMNA) que les associations martèlent de ne pas oublier. Et de constater que les promesses faites au lendemain du drame commencent déjà à s’éroder.

Ainsi en est-il de la fermeture du foyer de l’Etoile, annoncée par le Conseil d’Etat pour la fin du mois de mars. Il n’en sera finalement rien, confirme l’Hospice général, car il s’est avéré plus difficile que prévu de créer suffisamment de places alternatives.

Alors que l’afflux de jeunes réfugiés en Suisse a atteint des sommets en 2022 et que les prévisions du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) dessinent la même tendance pour 2023, Genève n’a toujours pas de politique pérenne en matière d’accueil des jeunes RMNA. Lesquels restent cantonnés à des structures inadaptées, où l’encadrement, insuffisant, a déjà fait l’objet de maintes critiques 2>Notre édition du 7 avril 2022..

Énième déception

«Nous voilà face à un huitième report depuis 2019», s’insurge Dario Lopreno, s’exprimant au nom du collectif d’organisation de la manifestation à la mémoire d’Alireza, qui rassemble notamment les associations actives sur les questions d’asiles, des syndicats et les partis de l’Alternative. «On nous ment en prétendant que le centre va fermer, alors qu’en réalité l’Etat n’a pas d’autre solution. Et sans solution, pas de fermeture», poursuit-il.

Depuis des années, les associations clament le besoin de trouver de nouvelles structures d’hébergement, plus adaptées à des jeunes migrants au parcours traumatique, et où un accompagnement adéquat pourrait leur être apporté. A ce jour, «l’encadrement fourni pour ces jeunes est au mieux quatre fois moins important que dans tout autre foyer genevois», rappelle Dario Lopreno.

Une disparité qu’un transfert de compétences de l’Hospice général – dont dépend le foyer de l’Etoile – à la Fondation officielle de la jeunesse (FOJ), avalisé par le Conseil d’Etat début 2020, devait permettre de combler. Dans les faits, ce modèle s’est très vite retrouvé dans une impasse, car «il n’est pas capable de gérer les flux qui sous-tendent, qu’on le veuille ou non, les questions d’asile. Le modèle de prise en charge de la FOJ privilégie les petites structures (8-10 places, ndlr). Pour loger les cent RMNA actuellement accueillis à l’Etoile, il faudrait créer douze foyers. Mais avec les projections du SEM, il en faudrait 25 à 30. C’est tout simplement irréalisable», commente le directeur de l’Hospice général, Christophe Girod. De fait, à peine une cinquantaine de jeunes ont été transférés, selon les chiffres de l’institution, vers de plus petites structures. Quelque 150 autres, RMNA ou jeunes adultes, attendent toujours au Foyer de l’Etoile.

Perspectives floues

Ce chiffre est amené à grandir plus vite que ne se dessinent des solutions alternatives et pérennes de logement et d’accompagnement de cette population. Pour les jeunes de 17 ans et plus, des perspectives existent du côté de l’hôtel-résidence St-James, aux Eaux-Vives. Moyennant des travaux pour lesquels une demande accélérée a été déposée, il pourrait accueillir dès la fin du mois de mai une centaine de personnes, mentionne l’Hospice général.

Une solution loin d’être idéale, critiquent les associations. Et qui, surtout, ne règle pas la question des adolescents entre 15 et 16 ans. «Depuis des années nous signalons que des maisons vides pourraient être réaffectées pour accueillir des jeunes dans des petites structures, sans que l’Etat ne se bouge», critique Dario Lopreno.

L’Hospice général assure que les réflexions sur l’évolution du modèle de prise en charge sont déjà d’actualité. Sans guère s’avancer sur la finalité ou l’échéancier. Tout est à réinventer alors qu’à la fin de l’année, le bail de location du terrain où se situe le foyer de l’Etoile arrive à échéance. Du moins théoriquement, car plusieurs prolongations ont déjà perpétué l’accueil dans cette structure qui n’a pourtant jamais été prévue ou pensée pour son affectation actuelle.

Dans l’intervalle, les manifestant·es ne comptent pas rester silencieux·ses. Un nouveau rassemblement est déjà agendé au 29 mars 3>Place du Rhône, 18h.. «Il faudra être quatre ou cinq fois plus pour augmenter la pression», appelle au mégaphone une intervenante, alors que la bise transit l’auditoire. En tête de cortège, la banderole «Alireza s’est suissidé», rappelle, elle, les conséquences tragiques de l’immobilisme politique.

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Si vous vous inquiétez pour vous ou un.e de vos proches, contactez de manière confidentielle 24h/7j

147 : ligne d’aide jeunes (147.ch)

143 : la main tendue, ligne d’aide adultes (143.ch)

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