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2022: l’année de tous les dangers pour les locataires

Le logement en question

La droite tente d’imposer un nouveau tour de vis néolibéral: sur les rentes, avec AVS 21, LPP 21 et l’initiative populaire des Jeunes PLR; avec des cadeaux fiscaux et des pertes de recettes (donc de prestations): en 2019 RFFA (2 milliards/an), l’année dernière abolition du droit de timbre (250 millions/an), de l’impôt anticipé (1 milliard à court terme, puis 170 millions/an) et des droits de douanes sur les produits industriels (563 millions/an). L’objectif est de réduire, au profit du capital, les faibles mécanismes de redistribution1>En comparaison internationale, la Suisse est un Etat faiblement redistributeur des richesses: Hümbelin, O., Farys, R., Jann, B. & Lehmann, O. (2021), «La redistribution par l’intermédiaire des impôts et prestations sociales en Suisse», Social Change in Switzerland, N°28, p. 12. de la richesse créée par le travail.

Une partie du produit de ces contre-réformes, en quête de rendements sûrs, sera investie dans l’immobilier, vu la conjoncture actuelle de taux d’intérêts bas, qui est aujourd’hui le terrain de jeu des investisseurs institutionnels (banques, assurances, fonds d’investissements, etc.). La majorité parlementaire s’emploie donc à démanteler le droit du bail pour accroître le «pouvoir de marché» des bailleurs.

L’ASLOCA a réalisé une enquête auprès de 18’000 locataires, qui révèle trois éléments: la difficulté pour deux tiers d’entre eux à trouver un logement abordable; la crainte de le perdre; et l’inclination à ne pas se mettre à dos son bailleur. Beaucoup de locataires ne font ainsi pas valoir leurs droits, car cela exige d’agir contre leur bailleur en justice.

Les relais politiques des milieux immobiliers ont bien saisi cette réalité et cherchent à renforcer cette dépendance, en facilitant les congés. Les plus fortes majorations de loyer se font par ailleurs au changement de locataire, si bien que rendre plus aisée une résiliation permet d’exercer une pression sur les loyers.

Deux textes parlementaires seront adoptés en 2022 et rendront plus aisé un congé pour le bailleur, en cas de sous-location (Egloff 15.455) ou pour évincer le locataire au motif de reloger un proche du bailleur ou ce dernier (Merlini 18.475). Le contexte actuel permet d’expliquer l’apparition de telles demandes chez les milieux immobiliers.

La sous-location est un droit. Le sous-locataire bénéficie actuellement d’une relative sécurité. Du moins tant que la sous-location ne dure pas trop, car la loi interdit au locataire principal de transférer son bail sans l’accord du bailleur, et il doit ainsi conserver l’intention de récupérer le logement dans un futur proche. L’initiative Egloff donnera le pouvoir au bailleur d’accepter ou non la sous-location. Elle ne sera plus un droit. Cette modification est ainsi une menace pour quantité de foyers, principalement dans les centres urbains: les plus aisés peuvent y obtenir un logement (à loyer élevé) auprès d’une régie; alors que les plus défavorisés y sont le plus souvent contraints de sous-louer pour trouver un loyer abordable.

L’initiative Merlini répond à d’autres intérêts. Elle vise à permettre au bailleur «physique» de congédier le locataire, en invoquant son propre besoin d’utiliser le logement ou celui d’un proche. Ce texte prévoit qu’un congé donné pour pareil motif pourra intervenir même après que le locataire a fait valoir ses droits avec succès. Elle videra donc de toute portée la protection contre les congés de représailles, lorsque que le bailleur n’est pas une personne morale. S’opposer à un tel congé est aujourd’hui en effet déjà compliqué. L’initiative rendra la contestation plus difficile encore pour le locataire, puisque les conditions à respecter par le bailleur seront «assouplies».

Des solutions existent pour desserrer l’étau qui pèse sur les locataires, en s’inspirant des progrès réalisés ailleurs en Europe ou des mécanismes administratifs qui ont protégé les locataires durant des décennies en Suisse. Nous y reviendrons dans une prochaine chronique. Cependant, pour que ces solutions puissent être mises à l’ordre du jour du débat politique en Suisse, il est essentiel de repousser les attaques présentées ci-dessus par référendum. 2022 doit être une année de mobilisation!

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Christian Dandrès est conseiller national et juriste à l’Asloca. Il s’exprime ici à titre personnel.

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mercredi 20 octobre 2021

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