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Toucher par le langage

Cette chronique littéraire a été écrite par une étudiante en Lettres de l’université de Genève, dans le cadre d’un atelier d’écriture animé par Magali Bossi et Natacha Allet.
Toucher par le langage
Roman

Le sanatorium, lieu de soin et de détente, n’a jamais paru aussi étrange. C’est dans l’un d’eux que nous entraîne l’autrice polonaise Barbara Klicka dans son dernier roman, à travers le regard de Kamila, une jeune femme de la ville obligée de suivre une cure dans la campagne polonaise. Au sein de l’établissement, la protagoniste s’accommode aux règles et se confronte à des êtres plus déroutants les uns que les autres. Entre le soignant dont les allusions frisent le ridicule, les vieilles dames insistant sur l’importance de procréer et un pensionnaire très… tactile, le lieu ne manque pas d’animation. A travers les interactions entre ces différents personnages extravagants, l’œuvre explore une intimité à la fois physique et sociale, dont les limites sont troubles.

Quant à l’intimité mentale, elle est inexistante: la plume de l’auteure offre en effet un accès absolu à l’esprit et aux souvenirs de Kamila qui ne peut rien cacher aux lecteur·trices: «Je lui souris. On ne sait jamais, je pourrais avoir besoin de l’aide de quelqu’un.» L’usage ingénieux de la première personne et du présent rapproche davantage encore de la jeune femme; le roman attire dans sa tête et dans son corps. Ce rapprochement est également suscité par des situations familières qui éveillent l’empathie envers Kamila, voire la complicité avec elle. Le style simple, autant dans le choix des mots que dans la syntaxe, marque un pas en plus vers elle. Ainsi, ses réflexions silencieuses ne seront pas sans rappeler celles que chacun·e se fait à soi-même. En résumé, Sanatorium ne se lit pas, mais se ressent.

Barbara Klicka, Sanatorium, trad. du polonais par Nathalie Le Marchand, Ed. Intervalles, 2021, 126 pp.

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