Uu patrimoine du XXe siècle à préserver
Dans les années 60 et 70, Genève a sacrifié son patrimoine architectural, y compris des bâtiments vieux de plusieurs siècles, sur l’autel du rendement immobilier. Notre canton s’apprête à faire de même avec de belles et rares réalisations de la seconde moitié du XXe siècle en autorisant la démolition des églises Saint-Pie X et Sainte-Jeanne-de-Chantal. C’est une erreur historique.
On peut comprendre la situation difficile des paroisses concernées. Il est évident que si ces deux églises étaient protégées, il faudrait trouver un accord d’indemnisation ou d’acquisition avec les paroisses qui les possèdent et n’ont plus les moyens de les entretenir. Mais la valeur architecturale de ces bâtiments, et surtout de l’église Sainte-Jeanne-de-Chantal, création magistrale de Jean-Marie Ellenberger, vaut bien un effort financier de la collectivité. En définitive, les «raisons financières» évoquées pour justifier le refus de protection de la part de l’Etat découlent de la volonté du canton de ne pas s’impliquer dans un sauvetage. Pourtant, une fois le bâtiment détruit, la perte sera définitive et inestimable. Sa forme particulière le rendrait très intéressant pour une reconversion dans le domaine culturel. Le quartier des Charmilles est déjà surdensifié, mais il manque cruellement de lieux de culture.
Peut-on espérer une mobilisation des défenseurs du patrimoine, des habitants du quartier, des milieux politiques (y compris les Vert·es, pour convaincre leur propre magistrat) de la Ville de Genève ainsi que d’acteurs privés en vue de promouvoir une alternative au triste projet de destruction et de bourrage du périmètre en cause ? Le sauvetage du cinéma Plaza a montré qu’il n’y avait pas de cause définitivement perdue tant que les pelleteuses n’étaient pas entrées en action.
Thierry Tanquerel,
professeur honoraire de l’université de Genève