Édito

Clivage générationnel et de genre

Clivage générationnel et de genre
On distingue un très net fossé de genres: les femmes ont refusé ce texte à 56% alors que les hommes l’ont approuvé à 58%. KEYSTONE
Suisse

Un fossé intergénérationnel et entre les genres. Le sondage VOX réalisé au sortir des urnes par l’institut GFS sur le scrutin du 7 mars est riche d’enseignements à propos de l’initiative contre la burqa acceptée par 51,2% du Souverain.

Tout d’abord, et la chose est relativement rare, on distingue un très net fossé de genres: les femmes ont refusé ce texte à 56% alors que les hommes l’ont approuvé à 58%. Une contradiction par rapport aux pseudo arguments féministes. Les premières concernées ne se sont donc pas reconnues dans cette proposition!

Un second clivage montre ensuite que ce sont les seniors qui ont fait le scrutin. Les moins de 50 ans ont en effet refusé l’initiative, avec des taux de refus pouvant aller jusqu’à 63% pour les 18-29 ans. Inversement, le «oui» l’emporte à plus de 60% chez les personnes âgées de septante ans et plus. On relève également un clivage religieux: les personnes se réclamant d’une confession ont en effet approuvé l’initiative, alors que les personnes sans religion, que l’on aurait pu soupçonner d’un biais anticlérical, ont au contraire voté contre ce texte. Relevons également un soutien plus affirmé chez les catholiques que chez les protestant·es.

Enfin, le clivage politique est riche d’enseignements. Seule l’extrême droite udéciste soutenait ce texte; il l’a pourtant largement emporté dans tout le bloc bourgeois: 58% au Parti libéral-radical, 60% au Parti du centre ! Un coin a certes été enfoncé à gauche avec un quart des électeurs et électrices socialistes qui ont voté l’initiative et 16% chez les Verts. Le taux chute à 9% pour l’extrême gauche. On a beaucoup glosé sur la division de la gauche. On constate que celle-ci était moindre qu’annoncée et que c’est bien la droite gouvernementale qui n’a pas suivi son gouvernement et ses député·es.

On relève enfin que les gens ont souvent voté sans se faire trop d’illusions. Celles et ceux qui a gauche ont refusé l’initiative l’ont fait tout en considérant que la burqa était contraire à la dignité de femmes. Et l’argument sécuritaire n’a pas convaincu ou, en tous les cas pas dans son argumentation principale (la lutte contre le terrorisme) chez les tenant de la loi anti-burqa. C’est bien plus la lutte contre le hooliganisme dans les stades qui a motivé les votant·es sensibles à cette problématique.

On reste donc sur le sentiment que les élu·es de gauche qui ont appuyé –parfois discrètement, parfois à visage découvert– l’initiative du comité d’Egerkingen se sont bel et bien fourvoyé·es en agissant de la sorte. Ce vote – vicié – pouvait être gagné par le bloc progressiste pour autant que celui affirme fortement ses valeurs. Cela a manqué. On peut le regretter.

Opinions Édito Philippe Bach Suisse

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