Passeport vaccinal: débat urgent
Une cinquantaine de projets étaient en compétition. Jeudi, le Conseil fédéral a annoncé avoir sélectionné deux solutions. L’une de l’Office fédéral de l’informatique, l’autre des entreprises SICPA et ELCA. Le but étant de doter la Suisse, d’ici l’été, d’un certificat vaccinal compatible avec les options retenues aux niveaux européen et mondial.
Avec de sérieux enjeux en terme de sécurité du système retenu. Le précédent projet avait d’ailleurs trébuché sur cet obstacle. Mais cela ne doit pas éluder le débat de l’usage qui sera fait du passeport vaccinal. En clair, le «comment ça marche» ne doit pas éluder le «à quoi ça sert». Et là, malgré les annonces faites mercredi et jeudi par le Conseil fédéral, un flou artistique subsiste. Or, c’est bien de libertés publiques qu’il est question, même s’il faut les mettre en balance avec l’intérêt global. Celles et ceux qui jouent le jeu du collectif en se faisant vacciner n’ont pas à faire les frais de l’individualisme galopant des rétifs aux vaccins.
Ainsi, s’il n’est pas choquant que certains pays exigent ce sésame avant une entrée sur leur territoire – après tout, dans certaines régions des vaccins sont déjà exigés, comme par exemple celui permettant de prévenir la fièvre jaune –, le risque d’un fossé Nord-Sud est réel. Le comité d’urgence de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) a notamment actionné la sonnette d’alarme en pointant le risque d’une circulation différenciée des personnes selon les richesses respectives de pays.
Le problème sera le même au niveau national. A quelle prestation le futur certificat de vaccination donnera-t-il droit? Faudra-t-il présenter son QR Code à l’entrée des cinémas, des théâtres, des musées, des festivals. Où placer la limite? On a bien vu en Chine l’accès aux magasins réservés à une clientèle pouvant montrer patte blanche…
Le risque d’une discrimination sanitaire point. Toutes les personnes qui n’auront pas été vaccinées dans les temps – notamment les jeunes – vont se retrouver sur le bord de la route. Ces questions ne sont pas anodines. Elles ne sont pas techniques mais bien politiques. Il est un peu regrettable que le pouvoir législatif, qui fonctionne sur un mode un peu attentiste durant cette crise, ne se soit pas emparé de cette question, connue depuis de nombreux mois alors que la vaccination de masse trouve ces jours-ci un rythme de croisière élevé. Cela aurait contribué à apaiser certaines craintes et, partant, aurait facilité la politique vaccinale.