Les derniers sondages donnent toujours une avance à l’initiative anti-burqa lancée par l’extrême droite. Mais elle se réduit. La dernière ligne droite sera décisive. L’occasion de rappeler qu’un double non – non à la burqa et non à l’initiative du comité d’Egerkingen – est de mise.

Une partie des opposants à cette initiative mettent en avant le droit à l’autodétermination pour dire leur refus de ce texte. Alors, certes, l’Etat n’a pas à nous dire comment nous habiller. Reste que ce rappel au libre-arbitre est aussi une boîte noire, un slogan commode permettant d’éluder certaines questions qui fâchent. La burqa, qu’on le veuille ou non, est aussi devenu le drapeau d’une constellation politique extrémiste, antidémocratique, qui véhicule la haine des femmes, voire dérive vers des actes terroristes.

Mais cela n’empêche nullement de glisser un non dans l’urne. Cette initiative est un leurre populiste. L’extrême droite tente de se doter d’un verni féministe. En l’occurrence, la disposition anti-burqa est inutile, islamophobe, inefficace et trompeuse.

Inutile, d’abord, car selon les chiffres en mains des autorités fédérales, seules une trentaine de femmes arboreraient une telle tenue et pour des motifs souvent forts divers.

Islamophobe, car l’initiative cible une communauté religieuse particulière et que cela s’inscrit dans un corpus de discriminations, d’essentialisations et de stigmatisations. La triste initiative sur les minarets n’en est qu’une des illustrations.

Inefficace, ensuite. Dans la perspective d’une lutte légitime et nécessaire contre l’aliénation patriarcale, est-ce ainsi que l’on va défendre des valeurs d’ouverture, d’égalité et d’autonomie, voire de protection des femmes face à certaines normes mettant à mal leur droit à l’autonomie?

La réponse négative est déjà contenue dans la question. Il n’est d’ailleurs pas anodin que les mêmes qui prétendent «libérer ces femmes» s’opposent à toutes les mesures de promotion d’égalité, de non-discrimination ou simplement de lutte contre le harcèlement.

Trompeuse, enfin, car les éléments de sécurité mis en avant – la dissimulation du visage potentiellement porteuse de dangers – sont d’ores et déjà proscrits par la loi et ont même fait l’objet d’un contre-projet qui entrera en vigueur en cas de refus de l’initiative.

Bref, ce texte ressemble davantage à un remugle du passé colonialiste, où l’on arrachait matériellement le voile au nom de la supériorité de l’impérialisme occidental. Il faut toujours se méfier lorsqu’on prétend nous imposer de prétendues libertés.