Édito

Aussi vite que possible

Aussi vite que possible
Décus de la lenteur des avancées, certains activistes du climat préfèrent rejeter la loi. Keystone
Environnement

A l’évidence, la loi sur le CO2 entérinée à fin septembre par les Chambres fédérales n’est pas à la hauteur de la grave crise climatique qui se profile. Une réalité qui a poussé certains grévistes du climat et les partis situés à la gauche du Parti socialiste à lancer un référendum. Désormais rejoints par l’UDC et autres climatosceptiques, qui trouvent au contraire la nouvelle loi beaucoup trop dirigiste.

C’est peu dire que le débat est vif à gauche (lire notre édition de vendredi) depuis que les jeunes activistes, essentiellement romands, ont annoncé leurs intentions. Non sans un certain paternalisme, ni parfois quelques clichés anticommunistes, la plupart des Verts et des socialistes ont durement fustigé la manœuvre. On peut regretter la forme, mais nous en partageons en grande partie le fond.

Etre déçu de voir la Suisse avancer (beaucoup) trop lentement est une chose, s’opposer à ces avancées en est une autre. Le référendum est l’outil du statu quo, est-ce cela dont a besoin la planète? Rejeter le contenu de la loi au motif de ce qui y manque est une curieuse vue de l’esprit. Que diable les critiques n’ont-ils pas saisi l’arme de l’initiative?

Affirmer qu’un éventuel refus de la loi sur le CO2 courant 2021 puis sa redéfinition par un parlement (le même, toujours de droite) serait plus rapide et efficace qu’une initiative rédigée par la gauche ressemble furieusement à une justification a posteriori. S’ils estiment que le peuple est prêt à déposer un «non» écologiste dans les urnes, il ne fait pas de doute que leur initiative ferait un carton!

Quant à dénoncer comme néfastes – car antisociales – de modestes taxes sur le chauffage et les transports polluants (dont l’essentiel est pourtant redistribué à la population) revient à renoncer à toute fiscalité incitative. En toute logique, ces mouvements devraient militer contre tous les prélèvements linéaires qui plombent la consommation populaire…

Enfin, estimer que l’adoption de la loi sur le CO2 «fermerait» le débat pour les prochaines années est pour le moins décevant: depuis quand les mouvements populaires s’en remettent-ils au Parlement pour dicter l’agenda?

Sans doute les grévistes du climat n’ont-ils pas saisi toute la difficulté de leur démarche. Au moins sont-ils dans leur rôle d’aiguillon de la gauche parlementaire et de rempart contre l’autosatisfaction. Il est beaucoup plus désolant de voir des mouvements politiques chevronnés partir bille en tête dans un combat qui pourrait balayer des mesures indispensables et urgentes. Investissements dans le rail (notamment les trains de nuit), taxes sur les énergies fossiles, taxe sur les vols en jet privé et en avion de ligne, réduction de plus de moitié des émissions des nouveaux véhicules d’ici 2030…

Honnêtement, qui dira non?

Opinions Édito Benito Perez Environnement

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