Édito

Propagande guerrière

Propagande guerrière
En quelques heures, le général Qassem Soleimani est passé de personnage connu des spécialistes du Moyen-Orient à ennemi public numéro un (ici, affiches du général dans une rue de Téhéran). KESYTONE(
Iran

Depuis une semaine, le ton est monté au Moyen-Orient à la suite de l’assassinat au moyen d’un drone, par les Etats-Unis, du général iranien Qassem Soleimani. Et, c’est un euphémisme, on a même commencé à entendre des bruits de bottes. Lorsque le ton devient martial, il est encore plus nécessaire d’activer son radar à détection de propagande. Guerre et bourrage de crâne font bon ménage, comme l’ont montré les deux guerres du Golfe.

Depuis quelques jours, les tensions semblent retomber un peu. Ce qui est une bonne nouvelle. Une agression étasunienne légitimerait les velléités iraniennes auprès de toutes les moyennes puissances de se doter de l’arme nucléaire pour se défendre contre l’agressivité de la puissance impériale. Et, partant, rendrait le monde plus dangereux.

Reste qu’on a déjà eu droit à quelques échantillons de propagande guerrière. En quelques heures, le général Qassem Soleimani est passé de personnage connu des spécialistes du Moyen-Orient à ennemi public numéro un, qui avait bien mérité son sort.

Avec des arguments fleurant bon la manipulation, pour ne pas parler de mensonges. Des attaques imminentes contre des Etasuniens se préparaient. Imminentes à quel point? On ne le saura jamais. Le général aurait aidé les auteurs des attentats du 11-Septembre, comme le montre le rapport sur cet acte terroriste, a affirmé le vice-président des Etats-Unis. En fait, ce document relève qu’effectivement, ces kamikazes étaient passés par l’Iran, mais que ce pays ignorait tout de leurs intentions. Avec ce genre d’arguments, l’Allemagne, où avait étudié Mohamed Atta, le «cerveau» de l’opération, pourrait se faire bombarder.

Pendant ce temps, la question de la légitimité de la présence étasunienne en Irak n’est opportunément plus posée. La machine à décérébrer s’est mise en route. Tout ce qu’affirme un gouvernement n’est pas forcément vrai. On l’avait vu avec l’éhonté mensonge sur les armes de destruction massive ayant servi à justifier l’invasion illégale de l’Irak lors de la seconde guerre du Golfe. Le rôle des médias est aussi et surtout de mettre en perspective.

Il ne suffit pas de relayer un propos officiel et de s’en laver les mains en se réfugiant derrière la pseudo-neutralité de la presse. La formule – peut-être apocryphe – est attribuée à Jean-Luc Godard: «L’objectivité à la télévision, c’est cinq minutes pour Hitler, cinq minutes pour les Juifs.» Elle vaut pour tous les médias. Mais aussi pour les lecteurs. I

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