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Rester dans l’opposition?

Jean-Jacques Maillard se demande si la non élection de Regula Rytz n’est pas une chance pour les Verts.
Politique

Suite à leur brillant résultat aux dernières élections fédérales, les Verts ont donc tenté de faire élire leur présidente au sein du Conseil fédéral. D’un point de vue comptable, c’était un droit indiscutable. Mais d’un point de vue politique? Les Verts voulaient-ils vraiment assumer une place de conseiller fédéral minoritaire dans un exécutif à solide domination bourgeoise? Comme les ­socialistes?

S’il est vrai que le succès des Verts est dû, pour l’essentiel, à leur combat écologique, à leur jeunesse et à leur dynamique féminine, force est de reconnaître qu’il est aussi le résultat des errements socialistes qui ont dépensé leur énergie à défendre les positions intenables de leur conseiller fédéral Alain Berset durant la dernière législature. Si je dis dernière législature, c’est que je pense surtout à la réforme sur la prévoyance vieillesse 2020 et à l’imposition des entreprises RFFA. Mais cela fait bien plus longtemps, en réalité depuis l’introduction de la «formule magique», en 1959, que les socialistes traînent ce boulet.

Je prendrai pour exemple deux projets sociaux importants, dont on subit particulièrement les conséquences aujourd’hui, et qui ont trouvé grâce aux yeux du peuple avec la participation active des socialistes:

1. En 1972, le système des trois piliers (AVS, prévoyance professionnelle, épargne individuelle), un contre-projet du Conseil fédéral à l’initiative du Parti du Travail «Pour une véritable retraite populaire», basée sur l’AVS. Le parti socialiste qui avait déposé, le 18 mars 1970, sa propre initiative pour des pensions populaires (également basé sur l’AVS) a soutenu le contre-projet et retiré son initiative. Alors que l’AVS se porte beaucoup mieux que certains veulent bien le dire, on connaît aujourd’hui les problèmes de la prévoyance professionnelle qui, avec ses 800 milliards de capitaux, profite surtout à ses gestionnaires.

2. En 1994, la loi sur l’assurance maladie (LAMAL), héritée mais défendue fermement par la nouvelle conseillère fédérale Ruth Dreifuss avec le concours très actif de son parti alors que, jusqu’ici, les socialistes avaient toujours prôné des primes en fonction des revenus… Aujourd’hui, la gauche essaie toujours désespérément de se sortir de ce guêpier.
Pourtant, en 1983, à la suite de la non élection de Lilian Uchtenhagen, candidate socialiste au Conseil fédéral, un important vent de contestation avait soufflé au sein du PS. Certains en avait marre d’avaler des couleuvres et voulaient quitter le Conseil fédéral. Mais, malheureusement, ce ne fut que du vent…

Alors les Verts, qui doivent aussi leur succès aux positions sociales qu’ils ont défendues lors de la dernière législature, veulent-ils vraiment entrer au Conseil fédéral et emprunter le même chemin que les socialistes? Je ne l’espère pas. La non élection de leur candidate et surtout la manière dont cette candidature a été traitée par toute la droite leur a sans doute permis de se rendre compte qu’il valait mieux rester dans l’opposition. Surtout à la veille d’une échéance aussi importante que celle de la révision de la prévoyance vieillesse qui n’annonce rien de bon du côté de notre consensuel ministre des Affaires sociales…

Alors la non élection de Regula Rytz, une chance pour les Verts?

Jean-Jacques Maillard,
Genève

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