Édito

Une tribune indécente

Une tribune indécente
Mardi à Davos, Klaus Schwab a réservé un accueil très chaleureux au président brésilien Jaïr Bolsonaro.
Davos

Le Forum économique de Davos nous a habitués aux discours hypocrites des «grands» de ce monde; aux leçons des dirigeants des multinationales les plus prédatrices, nous expliquant comment réduire la pauvreté et la faim tout en préservant la planète, mais surtout leurs bénéfices. On ne s’étonne ainsi même plus qu’un nombre record de visiteurs débarquent en jets privés pour cette édition 2019, où le climat est «placé» au centre des débats. On ne peut par contre manquer de s’insurger contre la tribune offerte mardi par le WEF – et indirectement par la Confédération, qui soutient l’événement – à Jair Bolsonaro, invité d’honneur pour l’ouverture du Forum.

S’il a bien remporté les élections, le nouveau chef d’Etat brésilien ne peut décemment être accueilli comme un président normal. On ne peut le laisser vendre son «nouveau Brésil» sans lui opposer le moindre contradicteur; sans le questionner sur ses tirades racistes, machistes, homophobes et anti-droits humains.

A Davos, Bolsonaro a pourtant pu assurer que le Brésil est le pays qui protège le mieux l’environnement, avant de préciser à un Klaus Schwab admiratif que la sauvegarde de l’écosystème doit désormais avancer «main dans la main» avec le développement. Ne pas empiéter sur le business, donc. L’hôte bienveillant lui a ensuite offert une relance complaisante sur la lutte contre la corruption, prônée par l’ex-militaire. Sans évoquer l’enquête contre le fils de son invité, Flavio, accusé de versements plus que douteux. Ni les dernière révélations qui lieraient ce même fiston, sénateur élu, aux proches d’un des accusés du meurtre de la conseillère municipale carioca Marielle Franco.

Bref, Bolsonaro a reçu à Davos un adoubement inespéré pour un président d’extrême droite, nostalgique de la dictature, de la pratique de la torture et des exécutions extrajudiciaires. Klaus Schwab a même cru bon de conclure en lui souhaitant «le meilleur» pour les «grandes transformations» qu’il prévoit dans ce «nouveau Brésil», qui offrira à coup sûr «de grandes opportunités»… Pour les dirigeants de multinationales présents, cela va sans dire.

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