Budget et loi sur le CO2
Lors de la session d’hiver, le parlement a délibéré sur le budget 2019. Un nouvel excédent de plus d’un milliard de francs est prévu. Parallèlement, le budget de la coopération au développement est nettement insuffisant. Malgré cette excellente situation financière, le parlement ne respecte pas plusieurs des objectifs qu’il s’est fixés. De plus, le Conseil national a laissé passer l’occasion de financer plus équitablement le changement climatique. Non seulement ces décisions sont en contradiction flagrante avec notre tradition humanitaire, mais en plus, elles ne répondent pas à l’intérêt bien compris de la Suisse.
Le parlement compte sur un excédent important du budget 2019 et, pour le plan de financement 2020-2022, sur une évolution positive de l’économie et des finances de la Confédération. On ne voit rien de tout cela dans le budget de la coopération au développement. Dans ce domaine, le parlement ne respecte pas ses propres objectifs:
Premièrement, par rapport au crédit-cadre du Message sur la coopération internationale 2017-2020, approuvé en 2016, le retrait financier se monte à près d’un milliard de francs.
Deuxièmement, l’objectif que le parlement s’est plusieurs fois fixé de consacrer 0,5% du PNB à la coopération au développement manque sa cible de près de 350 millions dans le budget 2019. Le Conseil national a refusé plusieurs demandes visant à adapter le budget en conséquence.
Troisièmement, on ne compense même pas les mesures d’économies des dernières années. Les fonds alloués à l’aide humanitaire et à la coopération internationale bilatérale sont en deçà de ceux de 2015 (de plus de 120 millions de francs).
Des excédents se comptant en milliards aux dépens des plus pauvres, voilà en bref comment on conçoit le budget.
Une fois encore, le débat sur le budget s’appuie sur des chiffres qui n’ont rien à voir avec la coopération au développement. C’est ainsi que les sceptiques à propos de cette dernière ont à nouveau parlé du budget global du Département des affaires étrangères (DFAE) de 3,1 milliards de francs. Mais la coopération au développement bilatérale à long terme ne dispose que de 800 millions de francs, et l’aide humanitaire de 450 millions de francs. Même en comptant l’aide multilatérale et les contributions aux banques de développement, le budget du DFAE ne prévoit que 2 milliards de francs pour la coopération au développement.
A ces décisions budgétaires insuffisantes s’ajoute le fait que la loi sur le CO2, que le Conseil national a rejetée, ne prévoit aucune contribution de la Suisse au financement du climat, alors que le changement climatique provoque aujourd’hui déjà une nouvelle pauvreté et des mouvements migratoires importants. La Suisse est coresponsable du réchauffement climatique et, à ce titre, elle devrait aider les pays du Sud avec 1 milliard de francs par an au moins. Les interventions visant à se rapprocher un tant soit peu de cet objectif en taxant les billets d’avion ont été refusées au Conseil national. Maintenant que ce dernier a rejeté la loi lors de son vote final, il appartient au Conseil des Etats de se prononcer.
Caritas Suisse est déçue des résultats de la session d’hiver pour ce qui concerne la politique du développement. Non seulement il est honteux d’engranger des milliards d’excédent aux frais des plus pauvres de la planète et de refuser de prendre ses responsabilités climatiques, mais en plus, cette attitude irresponsable va clairement à l’encontre des intérêts bien compris du pays. Car on sait parfaitement que la sécurité, la prospérité et la qualité de vie d’un pays très intégré internationalement comme la Suisse dépendent des développements politiques, économiques et écologiques mondiaux.
L’auteur est responsable Politique et affaires publiques, Caritas Suisse.