Suisse

Valeur locative: vraie révolution en vue?

Valeur locative: vraie révolution en vue?
Le Conseil des Etats a lancé mardi un processus devant conduire à la suppression de la valeur locative, ce revenu fictif ajouté au revenu réel des contribuables propriétaires de leur logement et qui gonfle leur facture fiscale. (KEYSTONE/Alessandro Della Bella)
Immobilier

Un serpent de mer. Le Conseil des Etats a lancé mardi un processus devant conduire à la suppression de la valeur locative, ce revenu fictif ajouté au revenu réel des contribuables propriétaires de leur logement et qui gonfle leur facture fiscale. On en est au stade exploratoire. Le tout devra d’ailleurs encore faire l’objet d’une procédure de consultation en bonne et due forme. Mais c’est à une remise en cause fondamentale de l’imposition des biens immobiliers occupés par leurs propriétaires que l’on pourrait assister.

Pendant des années, cette vieille revendication portée par les lobbies des propriétaires s’est heurtée au fait que le parlement avait tendance à charger la barque: cet impôt était certes supprimé, mais sans contrepartie. En l’occurrence, le projet dévoilé mardi prétend, lui, viser une neutralité fiscale: en échange de cette suppression de la valeur locative, il ne sera plus possible de déduire les frais d’entretien de son logement ou les intérêts passifs.

L’Asloca, le lobby des locataires, n’a pas hurlé au loup, même si elle émet certaines réserves et pose ses conditions, comme nous l’a confirmé son président au niveau suisse, Carlo Sommaruga, par ailleurs conseiller national socialiste. Ainsi, au niveau cantonal, l’ancien système avec les déductions pour frais d’entretiens ou des intérêts hypothécaires devra être cadré. Par exemple via des plafonds inscrits dans la Loi sur l’harmonisation fiscale (LHID). Sinon, le risque est grand que certains veuillent le beurre – la suppression de cet impôt – et l’argent du beurre – garder la déductibilité du loyer hypothécaire pour la part cantonale de l’impôt qui est prépondérante. Deuxième risque identifié: que se passera-t-il à la prochaine crise économique? La tentation sera alors forte de relancer l’économie via une aide à la pierre – car, comme le dit l’adage, quand le bâtiment va, tout va – en rendant aux propriétaires certains de leurs anciens atouts fiscaux, tout en gardant l’acquis de l’abolition de la valeur locative. Troisième facteur, économique celui-là, à garder à l’œil: éviter un emballement du marché immobilier guetté par la surchauffe.

C’est donc la mesure du projet qui sera déterminante. Jusqu’ici les milieux immobiliers ont pêché par voracité et coulé eux-mêmes des projets qu’ils appelaient pourtant de leurs vœux. Ont-ils, depuis, été touchés par la grâce de l’équité fiscale ou simplement par le bon sens? Le processus de consultation devrait rapidement permettre d’y voir plus clair, étant entendu qu’en cas d’appétit gargantuesque de leur part, il serait sans doute exagérément optimiste d’attendre du parlement débordé qu’il calme ensuite leurs ardeurs. I

Suisse Philippe Bach Immobilier

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