Édito

Le climat, grand absent de la politique monétaire

Le climat, grand absent de la politique monétaire
Si la BNS avait été saisie par la grâce climatique et avait désinvesti 7,4 milliards de francs qu’elle a placés dans les entreprises les plus polluantes pour les réorienter vers des projets plus vertueux en la matière, elle aurait divisé par deux son empreinte carbone. KEYSTONE / prétexte
Climat

La politique de la Banque nationale suisse (BNS) est en contradiction avec celle voulue par le Conseil fédéral. En tous les cas pour ce qui est du climat. Les placements de l’établissement national doublent en fait les émissions de CO2 générées par la Suisse! C’est ce que met en évidence une étude commanditée par les Artisans de la transition, une association sœur de La RevueDurable, et qui a été publiée mardi1>Ce rapport peut être téléchargé sur www.artisansdelatransition.org.

Il y a un peu plus d’une année, un premier rapport avait été rendu sur la base des investissements de la BNS aux seuls Etats-Unis. Dans ce pays, une transparence boursière permet ce genre d’audit. Le document présenté mardi est plus complet et couvre environ 60% des placements en actions de la banque. Soit environ 92 milliards de francs. Résultat: la BNS promeut une hausse de la température de 4 à 5 degrés, selon les calculs de l’étude.

Cette dernière se veut pédagogique et prospective: si la BNS avait été saisie par la grâce climatique et avait désinvesti 7,4 milliards de francs qu’elle a placés dans les entreprises les plus polluantes pour les réorienter vers des projets plus vertueux en la matière, elle aurait divisé par deux son empreinte carbone.
Et elle aurait fait une bonne affaire: ses résultats financiers auraient été améliorés de quelque 20 milliards de francs. Car les investissements dans le gaz de schiste et autres secteurs polluants sont à risques. La politique de la BNS est donc irrationnelle tant sur le plan de la durabilité que sur le plan économique.

Une obstination que ne partagent d’ailleurs pas forcément les autres banques centrales qui tentent de se doter de moyens pour lutter contre le réchauffement climatique, notamment en imaginant des outils économiques à même de réorienter les marchés financiers.

Au niveau fédéral, une initiative parlementaire portée par la verte Adèle Thorens propose de son côté de modifier la loi sur la BNS pour l’obliger à respecter l’article 2 de la Constitution fédérale. En clair: l’amener à inclure dans sa politique les critères de durabilité et pas seulement la stabilité de la monnaie nationale.

La question qui est posée est donc bien celle – une fois de plus! – du contrôle du politique sur notre banque centrale. On l’avait vu lors de l’épisode du franc fort, on le constate une nouvelle fois sur le sujet bien plus grave et urgent de l’avenir de la vie humaine sur notre planète.

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